cbe - Faust - Le Roi de Thulé

JOHANN WOLFGANG VON GŒTHE

EIN KÖNIG IN THULE

Extrait de : « Faust ».
Il s'agit de l'un des trois Lieder que chante l'héroïne du Faust, Marguerite ;
le Lied qu'elle chante après sa première rencontre avec Faust,
alors qu'elle vient de s'éprendre de lui.

Es war ein König in Thule
Gar treu bis an das Grab,
Dem sterbend seine Buhle
Einen goldnen Becher gab.

Es ging ihm nichts darüber,
Er leert' ihn jeden Schmaus ;
Die Augen gingen ihm über,
So oft er trank daraus.

Und als er kam zu sterben,
Zählt' er seine Städt' im Reich,
Gönnt' alles seinem Erben,
Den Becher nicht zugleich.

Er saß beim Königsmahle,
Die Ritter um ihn her,
Auf hohem Vätersaale,
Dort auf dem Schloß am Meer.

Dort stand der alte Zecher,
Trank letzte Lebensglut,
Und warf den heil'gen Becher
Hinunter in die Flut.

Er sah ihn stürzen, trinken
Und sinken tief ins Meer,
Die Augen täten ihm sinken,
Trank nie einen Tropfen mehr.

Lied Ein König in Thule (extrait de Faust)
de Johann Wolfgang von Gœthe.

Un Roi en Thulé,
traduction de Gérard de Nerval du Lied
Ein König in Thule (extrait du Faust)
de Johann Wolfgang von Gœthe.

Autrefois un Roi de Thulé
Qui jusqu'au tombeau fut fidèle,
Reçut à la mort de sa belle
Une coupe d'or ciselé.

Comme elle ne le quittait guère
Dans les festins les plus joyeux,
Toujours une larme légère
À sa vue humectait ses yeux.

Ce prince à la fin de sa vie
Lègue tout, ses villes, son or,
Excepté la coupe chérie
Qu'à la main il conserve encore.

Il fait à sa table royale
Asseoir ses barons et ses pairs
Au milieu de l'antique salle
D'un château que baignaient les mers.

Alors le vieux buveur s'avance
Auprès d'un vieux balcon doré,
Il boit lentement puis il lance
Dans les flots le vase sacré.

Le vase tourne, l'eau bouillonne.
Les flots repassent par-dessus.
Le vieillard pâlit et frissonne.
Désormais il ne boira plus.

Lied Ein König in Thule (extrait de Faust)
de Johann Wolfgang von Gœthe.

Un Roi en Thulé,
traduction-adaptation par Émile Raudrac du Bray
du Lied Ein König in Thule (extrait de Faust)
de Johann Wolfgang von Gœthe.
Copyright © Patrick Émile Carraud, 2003

En Thulé, un roi au cœur d'or
En amour, toujours fut fidèle,
Fidèle, ce roi de Thulé, jusqu'à sa mort.
En mourant, sa dame, dans un ultime effort,
En mourant lui donna, sa belle,
Un beau vase, une coupe d'or.

Rien ne lui semblait aussi cher.
À chaque plat il y buvait,
Pleins de larmes dans ses yeux fiers,
À chaque fois qu'il le vidait.

Quand s'en vint l'heure de sa mort,
Les biens du royaume il compta,
Pour ses héritiers partagea ;
Hors le vase, la coupe d'or.

Et il siégeait à la table royale,
Et les chevaliers l'entouraient, le front amer,
Là-bas, dans la haute salle ancestrale,
Là-bas, dans le château, aux rives de la mer.

Là-bas, se dressait le vieux roi buveur
D'une ultime goutte de vie, rude liqueur,
Et qui projeta le vase sacré,
Tout en contrebas, au cœur des flots agités.

Il le vit lentement tournoyer dans les airs,
S'emplir, tout en bas, des eaux claires de la mer.
Alors que sa perte de ses yeux il fixait,
Il sut enfin que jamais plus il ne boirait.

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