COLLECTION « DOMUS DRACONIS »

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Copyright © Carraud-Baudry, 2001-2022 



Sauf mentions contraires (copyright – ©) la substance du corps des textes de cette collection
relève du « domaine public », mais n'en relèvent pas nécessairement les éditions que nous en proposons, non plus que certains des textes annexes les commentant, certaines préfaces ou postfaces, par exemple
.


ESSAIS, POÈMES, SAGAS, MYTHES, LÉGENDES, HISTOIRE…


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  • LISTE DES AUTEURS DES TEXTES DE LA COLLECTION (DOMUS DRACONIS)


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  • LISTE DES TITRES DES TEXTES DE LA COLLECTION (DOMUS DRACONIS)


    Une appréciation, toute subjective, concernant l'attrait de chacun des textes proposés figure dans les rubriques ci-dessous. Plus notre jugement (noté par une ou plusieurs croix) est favorable, plus le nombre de croix est important.

    POÈMES - SAGAS - MYTHES — (+++++) —

    Ci-dessous se trouve reproduite la « NOTICE SUR LES EDDAS » figurant aux pages V et VI de l'ouvrage :

    « Tous les peuples ont eu recours aux dogmes religieux pour se rendre compte de l'origine de l'Univers et de sa conservation, de la mission de l'homme durant sa vie, et de son état après la mort. Les Eddas sont le résumé de la croyance des Scandinaves païens sur ces divers sujets.

    « Il y a deux Eddas : la plus ancienne et celle de Sæmund-le-Sage, l'Edda poétique ou rhythmique, contient un assez grand nombre de poèmes, composés à différentes époques par les skalds ou poètes, sur des sujets mythologiques et historiques. L'un de ces poèmes, la Prédiction de Wola, offre les traces incontestables d'une origine païenne extrêmement reculée.

    « L'Edda en prose est d'une date plus récente. On l'attribue à Snorre Sturleson, célèbre annaliste norwégien (1) ; mais il est évident que plusieurs écrivains ont participé à sa composition. Suivant toutes les probabilités, le travail de Snorre Sturleson s'est borné à une esquisse du voyage de Gylfe ; la mort ne lui a point permis d'y mettre la dernière main. Ce manuscrit, resté dans la famille de Sturleson, y a pris peu à peu des accroissements; divers auteurs se sont plu à l'augmenter, sans qu'il soit possible de déterminer avec certitude la limite où chacun s'est arrêté.

    « J'intervertis l'ordre chronologique en publiant d'abord la traduction de l'Edda de Snorre Sturleson : mon but, en agissant ainsi, est de faciliter la lecture de l'Edda poétique ; autrement elle serait devenue très-fatigante par la multiplicité des notes dont il aurait fallu accompagner le texte, afin de le rendre intelligible. J'ai mis un soin particulier à conserver, dans ma traduction, la couleur locale et la naïveté de l'original.

    « Les principaux manuscrits des Eddas sont : le Codex Regius ou Edda Royale, le Codex Wormianus (1), l'Edda d'Upsal (2) et six manuscrits de la Bibliothèque royale de Stockholm.

    « R. Du PUGET. »

    Note de la p. V :

    « (1) Né en 1178, mort en 1241. »

    Note de la p. VI :

    « (1) Appartient à la Bibliothèque royale de Copenhague.

    « (2) Donné en 1669 à la Bibliothèque de l'Université d'Upsal par M. le comte M. G. de La Gardie, chancelier de Suède. »

    Odin trônant ; les deux corbeaux Huginn et Muninn, et les deux loups Geri et Freki.

    L'illustration de ce paragraphe (extraite de :
    DAHN, Felix ; DAHN, Therese (geb. Freiin von [née baronne de] Droste-Hülshoff).
    Walhall. Germanische Götter - und Heldensagen. Für Alt und Jung am deutschen Herd erzählt..
    [Valhalla. Dieux germaniques - et légendes. Contés aux jeunes et vieux de la famille allemande].
    Achte Auflage [huitième édition]. Kreuznach : Verlag von R. Voigtländer, 1888. 665 p. Frontispice) est constituée de la reproduction
    d'une gravure d'Eduard Ade (1835–1907) réalisée d'après un dessin de Johannes Gehrts (1855–1921)
    représentant le dieu Odin trônant, les deux corbeaux Huginn et Muninn, et les deux loups Geri et Freki.
    [Source : https://archive.org]

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  • Auteur : Xxx (anonyme). (N. B. : Heinrich von Ofterdingen [en français : Henri d'Ofterdingen], énigmatique, voire mythique ménestrel du XIIIe siècle, aurait pu selon certains commentateurs contribuer à la rédaction, ou à la compilation, être le coordonnateur du Chant des Niebelungen [Der Nibelunge Liet…]).
  • Traducteur : Émile Louis Victor de Laveley.
  • POÈMES - SAGAS - MYTHES - LÉGENDES - HISTOIRE — (+++++) —

    Nous reproduisons ci-dessous la préface (dans une quasi intégralité) de l'ouvrage que nous vous proposons :

    « Le poème des Nîbelungen est la seule grande épopée nationale qu'aient produite les peuples de l'Europe depuis l'antiquité.

    « C'est un monument du plus haut intérêt pour l'histoire du développement de l'esprit humain, car mieux qu'aucun autre il permet de deviner les procédés mystérieux de la formation de la poésie épique, ainsi que nous avons essayé de le montrer. Il appartient non seulement à l'Allemagne, mais aussi à tous les pays qui ont été peuplés ou occupés par les tribus germaniques, car il renferme les traditions héroïques des Francs, des Burgondes et des Goths, et on y trouve le souvenir des anciens mythes que la race conquérante a apportés avec elle […]. Quoique coloré par le reflet des idées chrétiennes et chevaleresques du moyen âge, il offre une peinture unique des mœurs et des sentiments de la Germanie primitive. Ce poème est une production si importante, que Gœthe a cru pouvoir dire qu'il n'était permis à personne de ne pas le connaître.

    « Et cependant hors de l'Allemagne la grande épopée est peu connue. On en parle fréquemment, mais le nombre de ceux qui l'ont lue est très restreint. Le collège et l'université impriment dans la mémoire de la jeunesse le nom du moindre auteur de vers légers ou grivois ; mais nulle chaire n'a mission de lui parler des traditions épiques des peuples qui ont renouvelé la civilisation européenne. En publiant une traduction nouvelle du Nibelunge-nôt dans un format populaire, notre but a été de contribuer à répandre la connaissance d'une œuvre qui nous touche de plus près que l'Iliade ou l'Enéide, car elle est le produit des facultés poétiques de la race à laquelle nous appartenons.

    « Notre traduction n'a d'autre mérite que celui de la fidélité la plus scrupuleuse. Nous avons suivi l'original phrase par phrase, mot par mot, sans éviter les négligences, les obscurités, les répétitions qu'il présentait, au risque de manquer presque toujours d'élégance et même parfois de correction. Nous avons aussi conservé l'orthographe des noms de personnes et de lieux. Dans les monuments littéraires des époques primitives, non moins que dans les anciennes inscriptions lapidaires, chaque mot a une valeur propre qu'il faut s'efforcer de lui laisser car le plus léger changement dans la physionomie des termes suffit pour nous transporter dans un autre temps et dans un autre ordre d'idées. Le texte du Nibelunge-nôt ayant été comme celui des Livres sacrés, l'objet de commentaires étendus et d'études approfondies, nous avons cru devoir le rendre avec la même exactitude respectueuse, malgré ce qu'un semblable travail pouvait offrir de rebutant pour le traducteur et de peu attrayant pour le lecteur. »

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    POÈMES - SAGAS - MYTHES - LÉGENDES - HISTOIRE — (+++++) —

    Le texte de cet ouvrage est en langue allemande, en ancien allemand (altdeutsch) en fait ; ainsi s'agit-il donc ici d'une transcription des textes originaux.

    Nous reproduisons ci-dessous un court extrait de la préface (Vorwort) de l'ouvrage que nous vous proposons :

    « Diese neue ausgabe des grössten Schatzes, den wir aus dem literarischen Vermächtnisse unserer väter überkommen haben, ist zunächst, wie der titel besagt, dem teile des deutschen Volkes bestimmt, an welchem mein Herz am meisten hängt, und hat deshalb auch die dem Laute der spräche sich enger anschliessende, ihrer geschichtlichen entwickelung mehr entsprechende und zur belehrung mehr geeignete Schreibweise grammatischer und lexikografischer werke, so wie ein streng geordnetes und bei aller gedrängtheit der Fassung durchaus vollständiges Wörterbuch. »

    Traduction-adaptation du texte cité ci-dessus :

    « Cette nouvelle édition du plus important trésor littéraire (trésor auquel mon cœur se trouve au plus haut point attaché) que nous ont légué nos pères, est tout d'abord […] le partage de tous les peuples de l'Allemagne. Cette nouvelle édition de ce trésor littéraire, qui a marqué, qui marque l'unité de ces peuples par la langue, permet tout particulièrement de suivre, d'apprécier le développement historique de la langue, permet de s'instruire utilement sur l'écriture, la grammaire, la lexicographie, notamment, au moyen d'un thésaurus (compact mais très complet) élaboré avec tout le sérieux voulu. »

    Nous citons maintenant un extrait de l'ouvrage de Heinz Ritter-Schaumburg « Die Nibelungen zogen nordwärts » (Les Nibelungen vers le Septentrion:

    « Die Entdeckung des Nibelungenliedes

    « Unsere Vorstellung von den Nibelungen ist durch das Nibelungenlied geprägt. Aber die Kunde von den Nibelungen war Jahrhunderte lang verschollen. Um die Mitte des 18, Jahrhunderts hatte keiner in Deutschland, keiner gar im Ausland, je von ihnen gehört.

    « Zwei Schweizer Gelehrte, Johann Jakob Bodmer und Johann Jacob Breitinger, waren kurz vorher auf die Spur der mittelhochdeutschen Dichtung gekommen, die sie »Altschwäbische Dichtung« nannten, und Bodmer hatte einen kostbaren Minnesinger-Codex in Paris entdeckt und bekannt gemacht Aber sein Buch fand keinen Anklang. Nur aus der Poststraße in Berlin schrieb ihm ein Medizinstudent »inter strepitus nocturnos atque diurnos« (inmitten des Krachs bei Nacht und Tag) (!) einen begeisterten Hymnus darüber. Der Studen: hieß Jacob Hermann Obereit.

    « Bodmer suchte weiter; doch hatte er kein Glück mehr, obwohl er auf vielversprechenden Spuren war. Er hatte Schloß Hohenems im Auge und befand sich oft ganz in seiner Nähe. Aber er konnte sich nicht zur Reise dahin aufraffen. Jahre vergingen.

    « Obereit war Arzt geworden und hatte sich in Lindau im Bodensee niedergelassen. Hier bekam er »unvermuthete Gelegenheit, eine Reise nach Hohenems zu machen«. Am 29. Juni 1755, einem Sonnabend, stieg er vom oberen Rheintal her zum Schlosse auf, durchsuchte eifrig die alte Bibliothek und zog sehr bald zwei alte Codices hervor, von denen der eine, sorgsam in einst weißes Leder eingebunden, ein langes Gedicht enthielt, und er las, ohne eine Ahnung davon zu haben, was er hier gefunden: »Aventure von den Gibelungen«. —Er hatte sich verlesen: Das »G« war ein N. Es hieß richtig:

    « »Aventiure von den Nibelungen«

    « (iu = ü).

    « Es war eine der drei großen Pergament-Handschriften des Nibelungenliedes, später C genannt. Mit dieser Entdeckung traten die Nibelungen, zum ersten Mal seit Jahrhunderten, wieder in das Bewußtsein der Zeit.

    « Obereit, der seine Entdeckung an Bodmer weitergibt, erkennt indessen bald, was er da entdeckt hat, und er wertet es auch gleich, indem er es den damals im höchsten Ansehen stehenden griechischen Epen, der Odyssee und der llias, an die Seite stellt: »Wie glücklich bin ich nicht, daß es mir besonders gleichsam vorbehalten war, just auf einmal ein paar große Epopeen unserer Alten… aus der barbarischen Finsternis wieder an den frohen Tag… zu bringen.«. ».

    (In : Heinz Ritter-Schaumburg. Die Nibelungen zogen nordwärts. St. Goar : Reichl Verlag, 1981. 379 p. P. 23, 24.)

    Traduction-adaptation du texte cité ci-dessus :

    « La découverte du Nibelungenlied (Chant des Nibelungen).

    « Notre présentation des Nibelungen se trouve tout imprégnée du Nibelungenlied lui-même. Mais la connaissance des Nibelungen, des siècles durant, s'était perdue. Vers le milieu du XVIIIe siècle plus aucune personne en Allemagne, non plus à l'étranger, n'en avait entendu parler.

    « Deux érudits suisses Johann Jakob Bodmer et Johann Jacob Breitinger, étaient parvenus peu de temps auparavant sur la voie de la poésie du moyen-haut-allemand, qu'ils désignaient par l'expression « art poétique vieux-souabe », et Bodmer avait découvert à Paris un précieux codex de ménestrel, et l'avait fait connaître. Mais son ouvrage le révélant ne fut pas bien reçu. Jusqu'à ce qu'un étudiant en médecine lui fit parvenir par la poste, depuis Berlin, une missive rédigée « inter strepitus nocturnos atque diurnos » (pendant le vacarme entre jour et nuit) (!) » d'enthousiastes louanges à ce sujet. L'étudiant se nommait Jacob Hermann Obereit.

    « Bodmer continua a chercher ; mais sans que ses recherches se montrent fructueuses, même s'il se savait avancer sur une voie prometteuse. Il avait pour point de mire le château de Hohenems, et souvent se trouvait à proximité. Mais il ne put jamais trouver le courage de pousser jusque-là ses investigations. Des années passèrent.

    « Obereit était devenu médecin, et s'était établi à Lindau, sur la rive du lac de Constance. Ici il eut l'occasion d'entreprendre un voyage le conduisant à Hohenems. Ici avait-il pu prétendre avoir « improbablement l'occasion de se rendre à Hohenems ». Le 29 juin 1755, un samedi, partant de la vallée supérieure du Rhin il se rendit au château, explora passionnément la vénérable bibliothèque du lieu et y découvrit deux très anciens codex, dont l'un, à la reliure de cuir autrefois blanc, contenant le manuscrit d'un long poème, et alors put-il y lire, sans avoir la moindre idée de l'importance de ce dont il prenait ainsi connaissance : « Aventure von den Gibelungen ». — Sa lecture était erronée : le « G » était un N. Ce manuscrit s'intitulait en fait :

    « « Aventiure von den Nibelungen »

    « (iu = ü).

    « Il s'agissait là de l'un des trois plus importants manuscrits sur parchemin du Chant des Nibelungen, manuscrit plus tard connu sous la dénomination C. Par cette découverte, pour la première fois depuis des siècles, les Nibelungen retrouvaient une place dans la conscience du temps.

    « Obereit, qui a transmis sa découverte à Bodmer, reconnaît bientôt en celle-ci, en cette découverte qu'il vient, lui, de réaliser, une épopée analogue aux épopées grecques, Odyssée et Iliade, jouissant alors de la plus haute estime : « Je ne peux dire à quel point je suis heureux d'avoir été destiné, pour ainsi dire extraordinairement, à ramener, à juste titre, depuis des ténèbres barbares à un jour radieux… quelques-unes des grandes épopées de nos Aïeux. ». »

    Pour la première fois le 24 mars 1756 J. J. Bodmer fait référence explicitement au Chant des Nibelungen dans une publication hebdomadaire suisse, et une année plus tard formellement dans sa production dramatique.

    Ainsi Bodmer osa-t-il écrire : « J'eus le plaisir une année passée, de découvrir un tel ouvrage, si vénérable, avant les autres, avant qu'il ne risquât d'en venir à se perdre. » (i. e. : »Ich (!) hatte vorm Jahre das Vergnügen, ein solches zu entdecken, welches mir vor andern würdig scheint, daß es dem Untergange, dem es zueilt, sollte entrissen werden.« ; cité in : Heinz Ritter-Schaumburg. Die Nibelungen zogen nordwärts. St. Goar : Reichl Verlag, 1981. 379 p. P. 25.)

    Le Chant des Ni(e)belungen est parvenu jusqu'à nous par plus d'une trentaine de manuscrits (une dizaine de ceux-ci le comprenant dans son entièreté).

    Le plus récent fut rédigé au XVIe siècle. Le manuscrit découvert par Obereit dans la bibliothèque du château de Hohenems est l'un des trois plus anciens. Une soixantaine d'années après qu'il fut sorti de l'ombre des âges, il fut confié à M. Schuster, avant que le baron Joseph von Lassberg ne l'acquiert en 1815. En 1855 il appartient à la bibliohèque de la très aristocratique famille Fürstenberg. Depuis 2001 c'est la bibliothèque nationale du Land de Bade-Wurtemberg qui conserve le vénérable manuscrit.

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    N. B. : numérisation : Internet Archive - University of Toronto ; téléchargement depuis : archive.org

    POÈMES - SAGAS - MYTHES - LÉGENDES - HISTOIRE — (+++++) —

    Le texte de cet ouvrage est en langue allemande, en ancien allemand (Altdeutsch) sur les pages paires, mais comporte, sur les pages impaires, en regard donc de la transcription du texte original, une traduction en allemand moderne (Neudeutsch). Toutefois nous attirons l'attention du lecteur potentiel de cet ouvrage que celui-ci se trouve imprimé en caractères gothiques

    L'extrait (en allemand moderne) de « Das Nibelungenlied » que nous vous proposons de lire maintenant en constitue le commencement ; le commencement de la première aventure (« Erstes Abenteuer » ; intitulée dans la traduction de Karl Simrock : « Wie Kriemhilden träumte » — Ce que fut le rêve de Kriemhild:


    « Viel Wunderdinge melden | die Mären alter Zeit
    Von preiswerthen Helden, | von großer Kühnheit,
    Von Freud und Festlichkeiten, | von Weinen und von Klagen,
    Von kühner Recken Streiten | mögt ihr nun Wunder hören sagen.
     
    « Es wuchs in Burgunden | solch edel Mägdelein,
    Daß in allen Landen | nichts Schönres mochte sein.
    Kriemhild war sie geheißen, | und ward ein schönes Weib,
    Um die viel Degen musten | verlieren Leben und Leib.
     
    « Die Minnigliche lieben | brachte Keinem Scham;
    Um die viel Recken warben, | Niemand war ihr gram.
    Schön war ohne Maßen | die edle Maid zu schaun;
    Der Jungfrau höfsche Sitte | wär eine Zier allen Fraun.
     
    « Es pflegten sie drei Könige | edel und reich,
    Gunther und Gernot, | die Recken ohne Gleich,
    Und Geiselher der junge, | ein auserwählter Degen;
    Sie war ihre Schwester, | die Fürsten hatten sie zu pflegen.
     
    « Die Herren waren milde, | dazu von hohem Stamm,
    Unmaßen kühn nach Kräften, | die Recken lobesam.
    Nach den Burgunden | war ihr Land genannt;
    Sie schufen starke Wunder | noch seitdem in Etzels Land.
     
    « In Worms am Rheine wohnten | die Herrn in ihrer Kraft.
    Von ihren Landen diente | viel stolze Ritterschaft
    Mit rühmlichen Ehren | all ihres Lebens Zeit,
    Bis jämmerlich sie starben | durch zweier edeln Frauen Streit.
     
    « Ute hieß ihre Mutter, | die reiche Königin,
    Und Dankrat ihr Vater, | der ihnen zum Gewinn
    Das Erbe ließ im Tode, | vordem ein starker Mann,
    Der auch in seiner Jugend | großer Ehren viel gewann.
     
    « Die drei Könge waren, | wie ich kund gethan,
    Stark und hohen Muthes; | ihnen waren unterthan
    Auch die besten Recken, | davon man hat gesagt,
    Von großer Kraft und Kühnheit, | in allen Streiten unverzagt.
     
    « Das war von Tronje Hagen, | und der Bruder sein,
    Dankwart der Schnelle, | von Metz Herr Ortewein,
    Die beiden Markgrafen | Gere und Eckewart,
    Volker von Alzei, | an allen Kräften wohlbewahrt,
     
    « Rumold der Küchenmeister, | ein theuerlicher Degen,
    Sindold und Hunold: | die Herren musten pflegen
    Des Hofes und der Ehren, | den Köngen unterthan.
    Noch hatten sie viel Recken, | die ich nicht alle nennen kann.
     
    « Dankwart war Marschall; | so war der Neffe sein
    Truchseß des Königs, | von Metz Herr Ortewein.
    Sindold war Schenke, | ein waidlicher Degen,
    Und Kämmerer Hunold: | sie konnten hoher Ehren pflegen.
     
    « Von des Hofes Ehre | von ihrer weiten Kraft,
    Von ihrer hohen Würdigkeit | und von der Ritterschaft,
    Wie sie die Herren übten | mit Freuden all ihr Leben,
    Davon weiß wahrlich Niemand | euch volle Kunde zu geben.
     
    « In ihren hohen Ehren | träumte Kriemhilden,
    Sie zög einen Falken, | stark-, schön- und wilden;
    Den griffen ihr zwei Aare, | daß sie es mochte sehn:
    Ihr konnt auf dieser Erde | größer Leid nicht geschehn.
     
    « Sie sagt' ihrer Mutter | den Traum, Frau Uten:
    Die wust ihn nicht zu deuten | als so der guten:
    „Der Falke, den du ziehest, | das ist ein edler Mann:
    Ihn wolle Gott behüten, | sonst ist es bald um ihn gethan.”
    « […] »

    Ci-dessous voici comment E. de Laveley traduit en français (et en prose) le début du Chant des Nibelungen, le début de cette première aventure (« Le Rêve de Kriemhilt ») :

    « Les anciennes traditions nous rapportent des merveilles et nous parlent de héros dignes de louanges, d'exploits audacieux, de fêtes joyeuses, de pleurs et de gémissements. Maintenant vous pouvez entendre redire l'histoire merveilleuse de ces guerriers valeureux.

    « Il croissait en Burgondie une jeune fille si jolie, qu'en nul pays il ne s'en pouvait rencontrer qui la surpassât en beauté. Elle était appelée Kriemhilt, et c'était une belle femme ! À cause d'elle beaucoup de héros devaient perdre la vie.

    « De vaillants guerriers osaient, dans leurs désirs, prétendre comme il sied à la vierge digne d'amour ; personne ne la haïssait ! Prodigieusement beau était son noble corps. Les qualités de cette jeune fille eussent orné toute femme.

    « Trois rois la gardaient, nobles et puissants : Gunther et Gêrnôt, guerriers illustres, et Giselher, le plus jeune, un guerrier d'élite. La vierge était leur sœur, et ces chefs avaient à veiller sur elle.

    « Ces princes étaient bons et nés d'une haute race. Héros accomplis, ils étaient démesurément forts et d'une audace extraordinaire. Leur pays s'appelait Burgondie : ils accomplirent des prodiges de valeur dans le pays d'Etzel.

    « Ils habitaient en leur puissance à Worms sur le Rhin. Beaucoup de fiers chevaliers de leurs terres les servirent, avec grand honneur, jusqu'au temps de leur mort ; mais eux périrent lamentablement par la jalousie de deux nobles femmes.

    « Leur mère, reine puissante, s'appelait dame Uote. Leur père Dankrât, qui en mourant leur laissa son héritage, était doué d'une grande force  ; dans sa jeunesse, il avait aussi acquis beaucoup de gloire.

    « Ces trois rois étaient, comme je l'ai dit, d'une haute valeur : aussi leur étaient soumis les meilleurs guerriers dont on ait ouï parler, tous très forts et très intrépides dans les combats.

    « C'étaient Hagene de Troneje et son frère Dancwart le très agile, et Ortwîn de Metz, et les deux margraves Gère et Eckewart, et Volkêr d'Alzeye, doué d'une indomptable valeur.

    « Rûmolt, le maître des cuisines, un guerrier d'élite ; Sindolt et Hûnolt, qui devaient diriger la cour et les fêtes comme vassaux des trois rois. Ceux-ci avaient encore à leur service beaucoup de héros que je ne puis nommer.

    « Dancwart était maréchal. Son neveu, Ortwîn de Metz, était sommelier du Roi. Sindolt, le guerrier choisi, était échanson; Hùnolt, camérier ; ils étaient dignes de remplir les emplois les plus élevés.

    « En vérité, nul ne pourrait redire jusqu'au bout la puissance de cette cour, l'étendue de ses forces, sa haute dignité et l'éclat de la chevalerie qui servit ses chefs avec joie pendant toute leur vie.

    « Et voilà que Kriemhilt rêva. Elle vit le faucon sauvage, qu'elle avait élevé pendant tant de jours, étranglé par deux aigles, et jamais rien en ce monde ne pouvait lui causer plus de douleur.

    « Lorsqu'elle dit son rêve à sa mère Uote, celle-ci ne put l'expliquer à la douce jeune fille autrement qu'ainsi  : « Le faucon que tu élevais est un noble époux, que tu dois bientôt perdre, si Dieu ne te le conserve. »

    « […] ».

    (In : Les Nibelungen. Poème. Traduit de l'allemand par E. de Laveleye. Paris : Ernest Flammarion, éditeur, s.d. (vers 1860). Tome premier : IV p. et 259 p. Tome second : 285 p. — ici les tome premier et tome second sont réunies en un seul volume — (Collection des Épopée nationales). Tome premier, p. 1-4).

    Ce noble époux, dont il est question ci-dessus, sera le héros Siegfrid (Siegfried). Siegfrid que Kriemhilt (Kriemhild) aimera passionnément ; que la reine Brunhilt (Brünhild) aimera également éperdument ; que le courageux et farouche Hagene (Hagen) tuera, pour satisfaire Brunhilt humiliée par Siegfrid et Kriemhilt, pour satisfaire la soif de vengeance de Brunhilt, devenue, malgré elle, l'épouse du roi Gunther, et ainsi la reine des Burgondes.

    Kriemhilt s'efforcera ensuite de venger la mort de Siegfrid. Elle y parviendra en épousant le roi Etzel (l'Attila historique [?]), et dans l'accomplissement de cette âpre vengeance perdra la vie, comme perdront la vie tous les héros de Burgondie…

    « De toutes parts des cadavres couvraient la terre, et la noble femme gisait là presque coupée en deux. Dietrîch et Etzel se prirent à verser des larmes. Ils pleuraient amèrement leurs parents et leurs hommes.

    « Tant de gloire et d'honneur avait péri. Tous les peuples étaient dans l'affliction et le désespoir. La fête du roi se termina d'une façon sanglante, car souvent l'amour finit par produire le malheur.

    « Je ne puis vous raconter ce qui arriva depuis, si ce n'est qu'on voyait chevaliers, femmes et nobles varlets pleurer la mort de ceux qu'ils avaient aimés. Ici prend fin ce récit : c'est la détresse des Nibelungen. ».

    (In : Les Nibelungen. Poème. Traduit de l'allemand par E. de Laveleye. Paris : Ernest Flammarion, éditeur, s.d. (vers 1860). Tome premier : IV p. et 259 p. Tome second : 285 p. (Collection des Épopée nationales). Tome second, p. 279-280).

    Siefrieds Tod - Mort de Siefried.

    L'illustration de ce paragraphe est extraite de :
    DAHN, Felix ; DAHN, Therese (geb. Freiin von [née baronne de] Droste-Hülshoff).
    Walhall. Germanische Götter - und Heldensagen. Für Alt und Jung am deutschen Herd erzählt..
    Achte Auflage [huitième édition]. Kreuznach : Verlag von R. Voigtländer, 1888. 665 p. P. 602.
    La légende en est : « Siefrieds Tod » (Mort de Siegfried) ;
    gravure d'Eduard Ade (1835–1907) réalisée d'après
    un dessin de Johannes Gehrts (1855–1921).
    [Source : archive.org]

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    ESSAI - PRÉSENTATIONS - RÉSUMÉS - POÈMES - SAGAS - MYTHES - LÉGENDES - HISTOIRE — (++++) —

    Ci-après nous vous livrons un large extrait de la préface de cet essai (depuis le dernier paragraphe de la p. 7 à la p. 9) :

    « […] Ainsi s'était-on piqué de curiosité pour le Moyen Âge, ainsi s'était-on piqué de curiosité pour toutes ces mythologies mal connues des lettrés, toujours survivantes dans le folklore, dans la mémoire populaire, que l'on commença alors à transcrire, ou dormant dans les vieux recueils de parchemins sur les rayons poudreux de certaines bibliothèques.

    « On redécouvrit alors des écrits vénérables. On tira de l'oubli qui manqua les engloutir de nombreux textes ; le « Hildebrandslied » en 1812, bientôt le « Beowulf », l'un des plus anciens poèmes de la littérature anglaise, en 1815, et parmi d'autres, en 1835, la « Chanson de Roland ».

    « Mais, en prélude à cela, dans la bibliothèque du château de Hohenems, les « Aventure von den Nibelungen »1 avaient, dès 1755, été exhumées de la poussières des âges.

    « De ces « Aventure von den Nibelungen » de nombreux auteurs du monde germanique se sont inspirés. Mais, sans conteste l'oeuvre la plus célèbre qui en traita demeure la Tétralogie de Richard Wagner, « Der Ring der Nibelungen » (« l'Anneau du Nibelung »), qui fut présentée au public pour la première fois à Bayreuth en 1876, et composée des quatre opéras intitulées « Das Rheingold » (« L'Or du Rhin »), « Die Walküre » (« La Valkyrie »), « Siegfried », et « Götterdämmerung » («Le Crépuscule des Dieux »).

    « Précisons que la tétralogie wagnérienne, et, dans une moindre part, nettement, Les Aventures de Lyderic d'Alexandre Dumas, ne s'appuient pas seulement sur la légende des Nibelungen, mais aussi sur de nombreuses autres légendes germano-scandinaves.

    « Parmi celles-ci, s'appuient-elles notamment sur ces légendes rapportées par l'Edda en prose et l'Edda poétique islandaises, la Völsunga saga1.

    « La Völsunga saga (où Siegfried se nomme Sigurd) reprend principalement, en la structurant avec plus ou moins de bonheur, la substance des textes eddiques, mais aussi la matière d'autres textes médiévaux nordiques, germaniques, anglo-saxons voire ; et celle de certaines sources que, par ailleurs, nous ne connaissons pas, de sources aujourd'hui perdues.

    « Ici, dans ce volume, nous vous proposons un court résumé de la légende des Nibelungen, un autre de la Völsunga saga.

    « Nous avons jugé cela utile afin de satisfaire un tant soit peu le lecteur ne disposant pas, ou estimant de pas pouvoir disposer du temps nécessaire à la lecture de l'intégralité des vieux textes légendaires.

    « Ces résumés, ces évocations ne livrent qu'un aperçu très fragmentaire, ne recréent pas tout à fait le climat des textes germano-scandinaves qui les inspirent. Ces textes évoquent un univers fondamentalement païen, des mythes éternels dont les résumés que nous proposons ne peuvent rendre compte tout à fait. Toutefois nous espérons qu'ils pourront intéresser le lecteur curieux. »

    Voici les textes des notes du bas des pages 8 et 9 :

    « 1 – La graphie Nibelungen se trouve plus répandue que celle comportant un e après le i : Niebelungen. Nous avons toutefois eu recours à cette dernière pour composer le titre de l'ouvrage.

    « 1 – Ou Saga des Völsungär. »

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  • Auteur : Henri d'Arbois de Jubainville.
  • Auteur : Georges Dottin.
  • Auteur : Louis Duvau.
  • Auteur : Maurice Grammont.
  • Auteur : Ferdinand Lot.
  • POÈMES - MYTHES - HISTOIRE - LÉGENDES — (+++++) —

    Cuchulainn (Cuchulain, Cuchulin, Cuchullin…) se trouve au sein de la matière celtique d'Irlande le plus grand des héros, et sûrement le plus fier ; petit-fils de druide, neveu de roi, et peut-être conçu par le dieu aux savoirs et aux compétences polytechniques Lug lui-même, ayant suivi l'enseignement des meilleurs maîtres, et plus spécialement dans le cadre du métier des armes, il surpasse par les prouesses, les exploits guerriers qui lui sont prêtés, tous ceux à qui il sera confronté, tous les autres guerriers, tous les grands héros, les rois qui l'entourent ; jusqu'au jour fatal où le destin lui imposera une triste, mais digne, fin.

    Setenta venant de tuer le chien de Culann, ce qui lui vaudra le surnom de Cuchulainn (Chien de Culann).

    Extrait du Cycle d'Ulster (Conception de Cuchulain), p. 38 de l'ouvrage :

    « Elle alla ensuite vers son mari, et devint de nouveau enceinte. Elle mit au monde un fils ; […]. Et il porta le nom de Setanta jusqu'à ce qu'il eût tué le chien de Culann le forgeron : c'est seulement alors qu'il fut nommé le « chien de Culann », Cûchulainn. ».

    Extrait du Cycle d'Ulster (Festin de Bicriu), p. 88-89 de l'ouvrage :

    « 11. Après avoir réussi, selon son désir, à exciter les sentiments querelleurs de Conall le triomphateur, Bricriu va où se trouvait la troupe de Cûchulainn. « Eh bien, » dit-il, « ô Cûchulainn, toi le vainqueur des combats dans la plaine de Bri, toi qui portes si élégamment ton manteau sur les rives de la Liffey, ô flls bien-aimé d'Emain, favori des femmes et des fllles, ce n'est pas en vain qu'on t'a surnommé chien de garde de Culann, car tu es l'orgueil des Ulates, c'est toi qui les protèges dans leurs grandes attaques et dans leurs grands exploits, tu apprends à chaque Ulate quel est son droit. Le but auquel n'est arrivé aucun des Ulates a été atteint par toi. Tous les guerriers d'Irlande reconnaissent la supériorité de ton courage, de ta bravoure et de tes exploits. Pourquoi laisserais-tu à un autre des Ulates le morceau du héros, puisque, parmi les hommes d'Irlande, personne n'est capable de te le disputer ? » — « Je te le jure, » dit Cûchulain (sic), « je le jure par le serment qu'on prête dans ma nation, il sera sans tête celui qui viendra me disputer le morceau du héros. » Alors Bricriu partit, il retourna au milieu de ses gens ; il était calme comme s'il n'eût provoqué aucune querelle. »

    Nous vous proposons, en guise de présentation, de lire le texte ci-dessous, celui de la quatrième de couverture d'un ouvrage de Jean Markale (MARKALE, Jean. L'Épopée celtique d'Irlande. Paris : Éditions Payot & Rivages, 1971, 1993 (Bibliothèque historique Payot). 258 p.) :

    « À partir du VIIe siècle, dans leurs enclos monastiques si différents des abbayes continentales, les clercs irlandais se sont fait un devoir non seulement de transcrire les textes chrétiens et les grandes œuvres de l'Antiquité classique, mais aussi toutes les traditions celtiques des époques antérieures, pieusement transmises par voie orale de génération en génération.

    « On imagine alors combien ces manuscrits élaborés ainsi avec soin sont précieux pour la connaissance des civilisations celtiques, qui sont à la base de toute la culture de l'Europe occidentale.

    « Cet ouvrage […] est une exploration de l'univers si particulier de l'épopée gaélique d'Irlande, un commentaire à la fois littéraire, mythologique et philosophique sur les remarquables monuments qui nous restent d'une culture à peu près inconnue en France.

    « Et pourtant, il y a dans cette littérature épique de l'Irlande médiévale de véritables chefs-d'œuvre qui font partie du patrimoine européen.

    « Ce livre est donc à la fois la réhabilitation d'une littérature trop longtemps méprisée à cause de sa marginalité, et une contribution à la connaissance des racines culturelles les plus profondes du nord-ouest de l'Europe. ».

    Ce texte, relatif au sujet qui ici nous intéresse, peut assurément servir également à présenter l'ouvrage dont nous vous proposons de faire la lecture.

    Le tome V des Cours de littérature celtique de H. d'Arbois de Jubainville c'est-à-dire le tome I (et unique) de L'Épopée celtique en Irlande, comporte essentiellement des traductions, intégrales, ou non, de textes constituant la matière celtique de l'Irlande ancienne. Afin d'avoir une idée un peu plus précise de l'ouvrage en question nous vous engageons à lire les quelques lignes qui suivent qui sont extraites de sa préface…

    Préface.

    § I ; p. XVII, XVIII :

    « […] J'ai pensé que quelques traductions pourraient donner, au monde lettré et curieux de la France, une idée plus précise de l'épopée irlandaise. Malheureusement, le Táin bó Cúalngi et le Togail Bruidne dá Derga (2), les deux morceaux les plus importants du premier des cycles épiques irlandais, manqueront à notre recueil ; on en annonce de prochaines éditions, qu'il est prudent d'attendre. M. St. O'Grady va faire paraître un ouvrage (1) qui contiendra le morceau fondamental du deuxième cycle épique irlandais, cycle fort écourté dans le volume que je publie : voilà pourquoi ce volume-ci est qualifié de tome Ier, bien que j'ignore quand paraîtra le tome II, qui l'écrira, si même il sera jamais publié.

    « Quoi qu'il en soit, le tome Ier donnera au lecteur une idée approximative du progrès fait dans la connaissance d'un des principaux domaines de la littérature néo-celtique, depuis cent trente ans. »

    Notes de bas de pages (pages XVII et XVIII) correspondant au texte cité :

    « (2) M. Zimmer a donné l'analyse du Táin bó Cúalngi , dans la Zeitschrift für vergleichende Sprachforschung, t. XXVII, p. 442-475, celle du Togail bruidne dá Derga, ibid., p. 556-563. M. Max Nettlau a commencé, dans la Revue celtique, t. XII, p. 229, une étude savante sur ce dernier morceau.

    « (1) Silva Gadelica, 2 vol. in-8°, en souscription à Londres, librairie Williams and Norgate. »

    § VI ; p. XLI :

    « Nous n'insisterons pas sur les autres caractères d'antiquité qu'offrent les morceaux les plus anciens de la littérature épique irlandaise : char de guerre (1), absence du casque (2), de l'arc et des flèches (3), usage de prendre la droite pour éviter les mauvais présages (4), d'attribuer au meilleur guerrier une part de choix dans les festins (5), etc. (6).

    « L'épopée irlandaise, quelque barbare qu'elle soit, est, comme le droit irlandais, un monument d'une civilisation bien supérieure à celle des Germains les plus anciens ; si la notion romaine de l'Etat manquait à cette civilisation et si ce défaut était chez elle un vice radical, on y trouvait cependant une culture intellectuelle beaucoup plus développée que chez les Germains primitifs. […] »

    Notes de bas de page (page XLI) correspondant au texte cité :

    « (1) Voyez, par exemple, p. 207, la dernière strophe, et p. 337, 339-345, 436, 448 ; cf. p. 149.

    « (2) Le casque fait défaut, notamment dans la description de la p. 111; cf. p. 149.

    « (3) Voyez, p. 177, 178, comment Cúchulainn prend des oiseaux, et p. 226 comment les fils d'Usnech prennent le gibier, A la p. 76, ligne 1, au lieu de « flèche, » lisez « javelot. » Cf. p. 437.

    « (4) Voyez, p. 321, 334 ; cf. p. 336.

    « (5) Voyez p. 86 et suivantes : cf. Poseidonios, livre XXIII, cité par Athénée, livre IV, c. 40 ; Fragmenta historicorum graecorum, t. III, p. 250-251.

    « (6) Voyez à la fin de ce volume l'Index des principaux noms communs. »

    § VI ; p. XLIV :

    « […]. Ces traductions, en effet, ne sont point parfaites, je ne me dissimule pas leurs défauts, je prévois que des critiques nombreuses et légitimes pourront être dirigées contre elles ; ce que j'espère, est que parmi les collaborateurs dont je publie ici les premiers essais, il se trouvera quelqu'un pour traduire à nouveau un jour les pièces réunies dans ce volume ; je prévois sans envie que son travail fera oublier celui-ci ; j'applaudis d'avance au succès du jeune et mûr auteur auquel j'aurai préparé la voie et dont le nom prendra la place du mien. »

    (In : ARBOIS DE JUBAINVILLE, Henri (d'). Cours de littérature celtique. Tome V. L'Épopée celtique en Irlande. Tome I. Paris : Ernest Thorin, 1892. 536 p. P. XVII, XVIII, XLI, XLIV.)

    La reine Medb (Maeve - souvent - en anglais) trônant, et un druide officiant.

    Mais voici un extrait significatif de l'ouvrage…

    Extrait tiré du « Cycle d'Ulster — Festin de Bicriu » (p.114-118) :

    « […] 49. « Je vois, » dit la jeune fille, « un autre char » dans la plaine. » — « Dépeins-le-nous, » répondit Medb ; « dis-nous ses traits, sa mine, son ajustement ; dis quels sont la tournure de l'homme, la couleur du cheval, l'allure du char. » — « Eh bien ! » répliqua la jeune fille, « je vois l'un des chevaux attelés au char, cheval gris, à la cuisse large, furieux, au galop rapide et sauvage, allant par petits sauts, à la crinière longue, bruyant comme le tonnerre, la crinière arquée, la tête haute, la poitrine large, ardent…, les sabots durs et solides ; à eux quatre ils battent les oiseaux à la course. Ce cheval, en courant sur le chemin…, lance des étincelles de feu qui rougissent pendant que vigoureusement il s'avance ; le bout des brides dans sa gueule est enflammé. »

    « 50. « L'autre cheval est noir foncé, sa dure tête est ronde, son pied mince, son sabot large, sa force victorieuse, son allure très rapide, son poil bouclé, son dos large… À la fois gai et furieux, il a la démarche puissante, frappe fortement des pieds la terre ; sa crinière est longue, sa crinière est ondulée ; sa queue longue, élégante, balaie le sol autour de lui après la course où il a lutté contre les chevaux dans la prairie, puis vite il parcourt en sautant les vallées et les plaines…

    « Le char est fait d'osier entrelacé ; ses deux roues sont très jaunes et ferrées. Le timon est garni de laiton ; la caisse du char étamée, arrondie, solide ; le joug arqué, bien doré ; les deux rênes ondulées, très jaunes.

    « Le chef noir assis dans le char est le plus beau des hommes d'Irlande. Il porte une belle tunique de pourpre bien ajustée. Une broche guillochée d'or, au-dessus d'une figure à poitrine de femme, ferme l'ouverture de cette tunique, là où frappe très rapide le coup du guerrier. Il me semble voir, au fond de ses deux pupilles, huit de ces pierreries rouges qu'on tire de la tête des dragons. Ses deux joues, à la fois bleues, blanches et rouges comme sang, jettent des étincelles de feu. Il fait le saut guerrier du saumon. Du haut de son incomparable char de guerre il fait le tour belliqueux des neuf hommes (p. 44, 48, 98, 139).

    « 52. « Ce sont les gouttes de pluie qui annoncent l'orage. À sa description, j'ai reconnu cet homme-ci, » dit Medb, et elle chanta des vers :

    « Grondement de la mer irritée !

    Colère de monstre marin !

    Tison rouge de feu !

    Vague bruyante ! Ours magnifique comme un Romain !

    Rage de bête orgueilleuse !

    Noble tuerie de grand combat !

    Qui broie l'ennemi en lutte inégale.

    Ours furieux qui tue (?) cent guerriers sur leurs chars,

    Qui entasse exploits sur exploits, tête sur tête !

    Chantez de bon cœur un chant triomphal

    En l'honneur de Cûchulainn,

    Jusqu'à ce qu'il mange la farine de notre moulin. »

    « Je le jure comme jure ma nation ; » dit Medb ; « si c'est en colère que vient à nous Cûchulainn, tel un moulin broie dix pelletées d'orge très dur, tel cet homme, à lui seul, nous broira à terre et au soleil, quand même tous les guerriers de la province de Connaught nous entoureraient pour nous défendre à Cruachan. Mais calmons sa fureur et concilions-nous sa force. »

    La reine Medb (Maeve - souvent - en anglais) trônant.

    « 53. « Et, cette fois-ci, comment viennent-ils ? » demanda Medb à Findabair. Celle-ci répondit en chantant des vers :

    « Main contre main,

    Coude contre coude,

    Côté contre côté.

    Épaule contre épaule,

    Bord contre bord,

    Brancard contre brancard,

    Essieu contre essieu,

    Char contre char :

    Voilà comme ils sont tous, ô tendre mère !

    L'égale rapidité des chevaux victorieux

    Est telle que la foudre qui brisant perce les toits.

    La terre en tremble,

    Tant leurs sabots la frappent lourdement. »

    « Medb reprit, chantant aussi des vers :

    « Mettons devant eux de belles femmes toutes nues,

    Aux mamelles saillantes, découvertes, blanches,

    Avec beaucoup de jeunes filles prêtes à les accueillir.

    « Cour ouverte !

    Château sans défense !

    Cuves d'eau fraîche !

    Lits préparés !

    Nourriture pure, abondante !

    Bonne bière, noble, enivrante !

    Part de guerrier !

    « Salut aux combattants qui viennent !

    Certes, ils ne vous tueront pas. »

    « 54. Là-dessus, Medb, sortant par la porte extérieure du château, vint dans la pelouse, avec elle cent cinquante jeunes filles apportant trois cuves d'eau fraîche pour les trois héros qui précédaient la troupe des Ulates ; on les invita à s'y baigner pour calmer leur ardeur, puis on leur donna le choix ou de loger chacun dans une maison séparée ou de se réunir tous les trois dans la même. « Maison séparée pour chacun, » dit Cûchulainn. Puis on les conduisit dans leurs maisons ; ils y trouvèrent des lits magnifiques et les plus belles des cent cinquante jeunes filles ; Findabair, fille d'Ailill et de Medb, fut attribuée à Cûchulainn et vint dans sa chambre.

    Ensuite arriva le reste des Ulates. Ailill et Medb, entourés de leurs gens, vinrent leur souhaiter bienvenue, « Merci de votre bon accueil, » répondit [le jurisconsulte] Sencha, fils d'Ailill.

    « 55. Alors les Ulates entrent dans le château, le palais leur est livré tel qu'on l'a décrit : sept cercles et sept chambres à coucher du foyer à la paroi ; façade de bronze avec sculptures d'if rouge ; trois bandes de bronze au lambris ; murailles de chêne, toit de tuiles ; douze fenêtres avec ventaux vitrés. Au milieu du palais se dressait la chambre à coucher d'Ailill et de Medb, entourée de façades d'argent et de bandes de bronze ; à côté du lit et devant Ailill, on voyait la baguette d'argent dont Ailill frappait le poteau central du palais pour gronder les gens. Les guerriers d'Ulster firent le tour du palais d'une porte à l'autre. Les musiciens jouèrent tant que durèrent les préparatifs. Le palais était si vaste que tous les braves guerriers d'Ulster venus avec Conchobar y trouvèrent place. Dans la chambre à coucher (1) d'Ailill s'installèrent Conchobar, Fergus, fils de Roeg, et neuf autres des braves guerriers d'Ulster. Puis on leur servit un grand festin : il dura trois jours et trois nuits.

    « 56. Après cela, Ailill demanda à Conchobar et aux Ulates ses compagnons l'objet de leur voyage. […] »

    Notes de bas de page (page 118) correspondant au texte cité :

    « Le mot irlandais est imda, dont le sens propre est « lit » ; mais, le traduire par lit, est impossible ici. »

    (In : ARBOIS DE JUBAINVILLE, Henri (d'). Cours de littérature celtique. Tome V. L'Épopée celtique en Irlande. Tome I. Paris : Ernest Thorin, 1892. 536 p. P. 114-118.)

    Cuchulain in battle : Cuchulainn au combat.

    Les illustrations de ce paragraphe sont constituées de reproductions de gravures issues de plusieurs ouvrages.
    – La première nous montre Cuchulainn, encore jeune, immédiatement après qu'il eût tué le chien de Culann.
    La légende de l'illustration, de Stephen Reid, dans The Boys' Cuchulain d'Eleanor Hull (1904), est alors :
    « Cuchulain slays the hound of Culain » (Cuchulainn tue le chien de Culann).
    Cette illustration se trouve également, notamment, in :
    ROLLESTON, T. W. Myths & Legends of the Celtic Race. "Whit sixty-four full-page illustrations".
    New-York : Thomas Y. Cromwell Company Publishers (s.d.). 457 p.
    Planche entre les p. 184 et 185 : ici la légende est « The Hound of Cullan » (Le chien de Culann) ;
    le nom de l'illustrateur n'est pas renseigné et les illustrations sont en niveaux de gris dans cet ouvrage-ci,
    mais nous y paraissent toutefois de meilleure qualité.
    [Source : https://archive.org]
    – La deuxième illustration figure la reine Medb en compagnie d'un druide. Elle est également de Stephen Reid.
    On la trouve dans les deux ouvrages mentionnés ci-dessus.
    Dans Myths & Legends of the Celtic Race la planche se trouve entre les p. 204 et 205,
    la légende est ici : « Queen Maev and the Druid » (La reine Medb et le druide)
    (en anglais Medb est souvent rendu par Maeve ou Maev).
    [Source : https://archive.org]
    – La troisième illustration, d'un texte de Theodore Roosevelt, « The Ancient Irish Sagas » (Les anciennes Sagas irlandaises)
    dans le périodique, de janvier 1907, « The Century » (Le Siècle),
    est de Joseph Christian Leyendecker (1874-1951), et représente la reine Medb.
    [Source : http://www.bpib.com/illustrat/leyendec.htm]
    – La quatrième illustration, d'un texte de Theodore Roosevelt, « The Ancient Irish Sagas » (Les anciennes Sagas irlandaises)
    dans le périodique, de janvier 1907, « The Century » (Le Siècle),
    est de Joseph Christian Leyendecker (1874-1951), et représente le héros Cuchulainn au combat (« Cuchulain in Battle »).
    [Source : http://www.bpib.com/illustrat/leyendec.htm]

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    POÈMES - MYTHES - HISTOIRE - LÉGENDES - FOLKLORE — (+++++) —

    Nous vous proposons ce recueil de textes (« Barzaz Breiz ») dans cette collection « Domus Draconis » essentiellement en considération de certains des textes de sa première partie intitulée « Chants mythologiques, héroïques, historiques et ballades » (et tout particulièrement ceux-ci : « Les Séries ou Le Druide et l'enfant » (texte connu également sous le titre de « Vêpres des grenouilles »), « La Prophétie de Gwenc'hlan », « Le Seigneur Nann et la fée », « L'Enfant supposé », « Les Nains », « Submersion de la ville d'Is », « Le Vin des Gaulois et la danse du glaive », « La Marche d'Arthur », « La Peste d'Elliant », « Merlin, fragments de ballades », « Le Tribut de Noménoë »…).

    En guise de présentation de l'ouvrage vous trouverez ci-dessous des extraits de la Préface du recueil, ensuite de son Introduction ; puis de son Épilogue.

    Extraits de la Préface, p. IV-VI :

    « […] Pour rendre le recueil à la fois plus complet et digne d'un intérêt vraiment littéraire et philosophique, aucun soin n'a été épargné. J'ai parcouru en tous sens, pendant bien des années, les parties de la Basse-Bretagne les plus riches en vieux souvenirs, passant de Cornouaille en Léon, de Tréguier en Goélo et en Vannes, assistant aux assemblées populaires comme aux réunions privées, aux pardons, aux foires, aux noces, aux grandes journées, aux fêtes du lin ou liniéries, aux veillées, aux fileries ; recherchant de préférence les mendiants, les pillaouer, chiffonniers ambulants, les tisserands, les meuniers, les tailleurs, les sabotiers, toute la population nomade et chanteuse du pays; interrogeant les vieilles femmes, les nourrices, les jeunes filles et les vieillards, surtout ceux des montagnes, qui avaient fait partie des bandes armées du dernier siècle, et dont la mémoire, quand elle consent à s'ouvrir, est le répertoire national le plus riche qu'on puisse consulter. Les enfants même, dans leurs jeux, m'ont quelquefois révélé des trésors. Le degré d'intelligence de ces personnes variait souvent, mais ce que je puis affirmer, c'est qu'aucune d'elles ne savait lire, et que par conséquent pas une de leurs chansons n'avait pu être empruntée à des livres.

    « Celles que j'ai puisées dans le portefeuille des érudits bretons, qui m'ont libéralement permis de compléter mes recherches au moyen des leurs, n'étaient pas moins purement orales, comme j'en ai acquis la preuve aux lieux mêmes où on les chante. Dans la masse des matériaux ainsi obtenus, et qui feraient bien des volumes, les uns étaient remarquables au point de vue de la mythologie, de l'histoire, des vieilles croyances ou des anciennes mœurs domestiques ou nationales ; d'autres n'avaient qu'une valeur poétique ; quelques-uns n'en offraient sous aucun rapport. J'ai donc été forcé de choisir, mais je n'ai pas craint d'être trop sévère et de me restreindre extrêmement, me rappelant l'avis d'un maître, que la discrétion, le choix, sont le secret de l'agrément en littérature.

    « Pour avoir des textes aussi complets et aussi corrects que possible, je me les suis fait répéter souvent par différentes personnes et en différents lieux. Les versions les plus détaillées ont toujours fixé mon choix ; car la pauvreté ne me semble pas le caractère des chants populaires originaux; je crois, au contraire, qu'ils sont riches et ornés dans le principe, et que le temps seul les dépouille. L'expérience prouve qu'on n'en saurait trop recueillir de versions. Tel morceau qui paraît complet au premier abord, est reconnu tronqué lorsqu'on l'a entendu chanter plusieurs fois, ou présente des altérations évidentes de style et de rhythme dont on ne s'était pas douté. Les versions d'un même chant s'éclairant l'une par l'autre, l'éditeur n'a donc rien à corriger, rien à suppléer, et doit suivre avec une rigoureuse exactitude la plus répandue. La seule licence qu'il puisse se permettre est de substituer à certaines expressions vicieuses, à certaines strophes moins poétiques, les stances, les vers ou les mots correspondants des autres leçons. Telle a été la méthode de Walter Scott : je ne pouvais suivre un meilleur guide.

    « Le classement que j'ai adopté pour les textes n'est autre que celui des chanteurs eux-mêmes : ils ne connaissent plus guère que trois espèces de cantilènes : des chants mythologiques, héroïques, historiques, et des ballades, qu'ils appellent généralement au nom de gwers, dont ils qualifiaient autrefois quelques-uns de lais ; chants de fête et d'amour qu'ils nomment quelquefois kentel le plus souvent sôn ou zôn ; des légendes et des chants religieux.

    « Les pièces de chaque catégorie ont été rangées, les unes par ordre d'idées, les autres par ordre chronologique. Si elles contenaient un plus grand nombre d'idées et de souvenirs du passé, elles justifieraient le titre du recueil, qui serait véritablement alors le BARZAZ BREIZ, ou l'Histoire poétique de la Bretagne.

    Extraits de l'Introduction

    Extrait de l'Introduction, p. XLVI-XLVII :

    « On trouve parmi les chants qui forment ce recueil : Des ballades dont les personnages ont existé dans l'intervalle qui s'étend depuis le cinquième siècle jusqu'à nos jours ; Des chansons qui se rapportent à des superstitions druidiques depuis très-longtemps incomprises; à des fêtes dont l'origine et les cérémonies se perdent dans la nuit des temps ; à un ordre de choses qui a cessé d'être depuis le quinzième siècle ; à des événements sans importance qui ont eu lieu à la même époque ; Enfin, des légendes de saints bretons des premiers siècles de l'ère chrétienne, et des cantiques qui se rattachent aux fêtes les plus anciennes du catholicisme, ou qui ont pour sujet quelques-unes de ses doctrines fondamentales.

    « Or, à quelle époque, si l'on ne tenait aucun compte des caractères d'actualité de la poésie populaire indiqués plus haut, devrait-on attribuer les ballades et les chants domestiques des Bretons, car nous ne parlons ni de leurs cantiques, dont les auteurs probables sont connus, ni des légendes auxquelles s'appliqueront nos réflexions sur les chants héroïques et historiques ?

    « Est-il vrai que ces poésies ne remontent pas au delà du seizième siècle, comme on l'a prétendu ? Mais alors, autant vaut les croire toutes modernes, car il n'y a pas de raison pour qu'elles soient nées plutôt au seizième siècle qu'au quatorzième ou qu'au dix-neuvième. Est-ce que l'histoire d'Arthur, de Merlin, de Morvan, de Noménoë, d'Alain Barbe-Torte, ces héros bretons des vieux âges, était de nature à intéresser beaucoup plus les auditeurs du temps de la duchesse Anne que les auditeurs d'aujourd'hui, lesquels aiment cent fois mieux entendre la dernière chanson nouvelle ?

    « Est-ce que les malheurs d'un jeune Breton, prisonnier des hommes du Nord, ou ceux d'un autre guerrier, auxiliaire obscur de la conquête de l'Angleterre, expédition dont les paysans ne se doutaient pas plus au seizième siècle qu'à présent, pouvaient les toucher davantage ?

    « Est-ce qu'Abailard et Héloïse, la dame de Faouet ou la la dame de Beauvau, dont les maris partent pour la croisade, ou les Templiers, ou Jean le Conquérant, Jeanne de Montfort et tant d'autres sujets surannés étaient de nature à stimuler bien vivement la curiosité populaire au seizième siècle et à faire vivre le poète ? […]. »

    Extrait de l'Introduction, p. LI :

    « […] Les principaux agents surnaturels de la poésie populaire de Bretagne sont les fées et les nains. […].

    « Le nom le plus commun des fées bretonnes est Korrigan, qu'on retrouve, bien qu'altéré par une bouche latine, sous celui de Garrigenæ, dans une des éditions de Pomponius Mela, et presque sans altération sous celui de Koridgwen, dans les poèmes des anciens bardes gallois. Chez l'écrivain latin, il désigne les neuf prêtresses ou sorcières armoricaines de Sein ; chez les poètes cambriens, la principale des neuf vierges qui gardent le bassin bardique.

    « Ce nom semble venir de korr, petit , diminutif korrik, et gwen, gan, génie. […]. »

    Extrait de l'Introduction, p. LXXXII :

    « […] Au moyen âge, les Bretons Cambriens et les Bretons de l'Armorique, dans toutes leurs solennités, chantaient cet antique refrain : Non ! le roi Arthur n'est pas mort !

    « Le chef de guerre illustre, qui savait vaincre leurs ennemis, était encore pour eux, à cette époque, un symbole de nationalité politique.

    « Il y a un certain nombre d'années, au milieu d'une fête de famille que donnaient aux Bretons d'Armorique leurs frères du pays de Galles, en voyant flotter au-dessus de ma tête les vieux drapeaux de nos aïeux communs ; en retrouvant des mœurs semblables à nos mœurs, des cœurs qui répondaient à nos cœurs ; en prêtant l'oreille à des voix qui semblaient sortir des tombeaux, éveillées comme par miracle aux accents des harpes celtiques ; en entendant parler une langue que je comprenais malgré plus de mille ans de séparation, je répétais, avec enthousiasme, le refrain traditionnel. Aujourd'hui, quand je détourne mes regards vers cette poétique terre de Bretagne qui reste la même alors que tout change autour d'elle, ne puis-je répéter avec les Bretons d'autrefois : Non ! le roi Arthur n'est pas mort ! »

    Sachez que, à la fin de l'ouvrage, une partie intitulée « Musique » vous propose les partitions musicales des airs des chants du recueil (la partition de chaque chant voit sa pagination indiquée dans la Table des matières ; ceci bien que la partie Musique se trouve insérée à la suite de cette Table : dans une colonne la pagination « Texte et traduction », dans une autre, en chiffres romains, la pagination « Airs notés »).

    Sachez de même que le recueil comporte un très intéressant Épilogue qui mérite d'être lu, à tout le moins d'être parcouru si vous ne disposez pas du temps nécessaire : en effet cet épilogue offre une vue synthétique des textes du recueil, vous pourrez ainsi en saisir très aisément et rapidement (relativement) la substance…

    Voici un extrait de l'Épilogue (p. 523-526) en question :

    « Arrivé à la fin de cette publication, une réflexion me frappe qui m'impose un dernier devoir. Si les chants qu'on vient de lire offrent quelque intérêt poétique ou historique, ils ne sont ni moins précieux ni moins instructifs, au point de vue philosophique et moral. Ils retracent, en effet, le tableau fidèle des moeurs, des idées, des croyances, des opinions, des goûts, des plaisirs et des peines du peuple breton, aux différentes époques de sa vie. Il s'y peint d'après nature, avec ses vertus et ses vices, sans s'inquiéter de certaines difformités qu'il n'aperçoit pas, et que l'art apprend à dissimuler par la manière de les éclairer. Le portrait n'est qu'ébauché, sans doute, mais il est frappant de vérité.

    « L'homme y paraît sous trois aspects qui correspondent aux trois catégories du Romancero de la Bretagne, savoir : aux poésies mythologiques, héroïques, historiques et aux ballades ; aux chansons de fêtes et d'amour ; aux légendes et aux chants religieux.

    « Les premières nous l'ont montré enfant, puis adolescent, puis parvenant à l'âge mûr ; les autres nous ont initié à sa vie domestique, les dernières à sa vie religieuse.

    « Résumons les traits saillants d'un caractère et d'une physionomie remarquables.

    « On se souvient de cet enfant, debout près d'un vieillard austère qui lui répète sa leçon : c'est l'Armoricain au début de l'existence sociale, et qu'un druide instruit. Or, l'homme est un être enseigné : la semence morale déposée dans son âme n'y meurt point ; elle s'y développe, elle fructifie, et l'on peut encore, après bien des siècles, juger de la semence par les fruits. L'expérience le prouve, le sujet qui nous occupe confirme les observations de l'expérience.

    « L'enseignement que le prêtre païen donne à son élève est sérieux, grave, sombre, et, avant tout, religieux. A peine celui-ci est né, qu'il voit autour de son berceau la Mort, la Douleur et la Nécessité, divinités terribles qu'on lui dit d'adorer : soumis à la loi du destin, il les adore ; mais si le maitre lui montre la souffrance comme le lot de l'humanité ici-bas, il fait en même temps briller à ses yeux un royaume enchanté « plein de fruils d'or, de fleurs et de petits enfants qui rient ; » et le cœur du jeune néophyte, fermé pour la terre, s'ouvre avec l'espérance pour un monde meilleur.

    « La même voie fleurie le mène à l'amour du merveilleux ; son instituteur donne un aliment à ce penchant naturel à l'homme en l'entretenant d'un monde mitoyen, peuplé d'esprits mystérieux des deux sexes, les uns nains, composant des breuvages magiques : les autres naines, dansant avec des fleurs dans les cheveux et des robes blanches, autour des fontaines, à la clarté de la lune. Frappé par ces fraîches images, l'enfant croira aux esprits, aux sorciers, aux fées, à l'influence des astres ; il sera superstitieux et crédule.

    « Passant à un autre ordre d'idées, le maître apprend à son élève qu'un jour des vaisseaux étrangers descendirent sur les rivages de la patrie, et qu'ils la dévastèrent ; que les prêtres, pères et chefs du peuple, furent égorgés, hormis un petit nombre qu'on voyait errer, fugitifs, avec des épèes brisées, des robes ensanglantées, des béquilles. Et, devant ce tableau plus saisissant que celui devant lequel lit serment le jeune Annibal, l'enfant va jurer haine à mort aux étrangers, et protester qu'il défendra éternellement contre eux le culte de ses pères, les lois de son pays et son indépendance. De là naît dans son cœur, comme un doux fruit sur une tige amère, cet amour du sol natal et de la liberté, cet esprit de résistance opiniâtre, ce dévouement aux chefs nationaux, et cet instinct conservateur qu'il ne perdra jamais.

    « La suite des siècles nous l'a fait voir mettant en pratique les divers enseignements du maître. Un prince, ennemi et chrétien, le prend, l'enchaîne, lui crève les yeux, et il chante : « Je n'ai pas peur d'être tuè ; j'ai assez vécu ; peu importe ce qui arrivera, ce qui doit être sera : il faut que tous meurent trois fois avant de se reposer pour jamais. » Puis il poursuit d'imprécations l'étranger, oppresseur de son culte et tyran de son pays. C'est le barbare aux passions effrénées, inspiré par une haine aveugle que la raison ne peut ni blâmer ni absoudre. Ses vices ont le même caractère d'énergie sauvage que ses vertus. Chose étrange ! ils ont un mobile semblable, ils sont sacrés comme elles. Les sens grossiers qu'il a reçus de la nature, le ciel froid et pluvieux sous lequel il couche, la vie guerrière et rude qu'il mène, le dénuement presque complet où il se trouve des choses les plus nécessaires au bien-être, la rareté des occasions qu'il a de se distraire des soucis de sa misérable existence, tout le pousse à chercher les moyens les plus violents pour assouvir ses penchants brutaux : le pillage, l'ivresse et la danse les lui fournissent. Il pille donc, il danse et il boit ; et, en satisfaisant ainsi d'un même coup ses trois vices, l'amour du gain, l'amour des liqueurs fermentées et l'amour de la danse, il croit sérieusement s'acquitter d'un double devoir envers ses dieux et son pays ; car, d'une part, c'est le territoire ennemi qu'il ravage ; c'est le vin de l'étranger qu'il boit, et il le boit (chose horrible à dire !) mêlé au sang de l'étranger lui-même ; d'autre part, les rondes auxquelles il se livre sont saintes ; et ces rondes, ce vin, ce sang, il les offre en holocauste au Dieu-soleil qui le bénit et lui sourit.

    « Pour qu'il puisse distinguer un jour le bien du mal, il faudra qu'un autre soleil l'éclaire, qu'un enseignement nouveau modifie celui qu'il a reçu, qu'une nouvelle loi vienne régler ses nobles instincts et mettre un frein à ses passions mauvaises.

    « Cette loi, il la subit, et le premier cri qui s'échappe au jour de la bataille, de son cœur où la foi du Christ commence de germer, est un défi jeté à la mort, du milieu des eaux sanglantes du baptême, une hymne où la résignation chrétienne triomphe déjà du fatalisme païen. Le même sentiment éclate en ses paroles, quand la peste désole sa patrie : « La peste est au bout de ma maison, lorsque Dieu voudra, elle entrera, dit-il ; lorsqu'elle entrera, je sortirai. » Toutefois, le christianisme pratique n'a pas encore pénétré dans ses mœurs ; les Hébreux étaient moins éloignés de la doctrine évangélique ; ils disaient : « œil pour œil, et dent pour dent ; » lui, le disciple des druides, il s'écrie, tout chrétien qu'il semble : « Cœur pour œil, et tête pour bras. »

    « Ce langage atroce, justifié à ses yeux par l'amour du pays, il le tient et le traduit en actions pendant toute son enfance et pendant toute sa jeunesse. « Il voudrait, dit-il, écraser le cœur du roi ennemi entre la terre et son talon » ; et, bravant une mort certaine, il marche seul contre mille ; il suspend en trophée, au pommeau de la selle de son cheval, comme à la porte de sa maison, la tête de l'étranger vaincu ; il rit (et serait blâmé de ne pas rire), il rit de bonheur en voyant l'herbe rougie du sang des oppresseurs de sa nation ; il se couche parmi leurs cadavres comme un lion rassasié au milieu d'un troupeau de daims égorgés, et il se délasse en les regardant. Mais quel changement soudain s'est opéré en lui ? Voilà que ces mêmes yeux qu'un spectacle aussi effroyable a charmés versent des larmes de reconnaissance et de piété ! Le barbare tombe à genoux devant le Dieu qu'il a invoqué, et auquel il doit la victoire ; il lui élève des autels comme au soutien de son pays, comme à son protecteur, et la religion remporte sur lui un nouveau triomphe. Elle l'a rendu modeste au milieu du succès, elle lui inspirera la résignation dans les fers, elle le consolera, elle lui donnera l'espoir ; et un jour que tout le monde l'aura oublié, que personne ne le reconnaîtra plus sous la casaque de plomb dont l'étranger l'aura chargé ; un jour que sa barbe, devenue grise, descendra jusqu'à sa ceinture, et qu'il ressemblera à un chêne mort depuis sept ans, alors la foi passera sous les traits de la sainte patronne du pays ; elle le regardera, elle le reconnaîtra, elle pleurera, elle coupera ses chaînes, et lui, poussant son cri de guerre, il appellera son pays aux armes. — Aux armes ! — répondent les guerriers. Et pour tribut, il offre aux ennemis la tête du gouverneur chargé de percevoir la taxe ; il les moissonne comme le blé dans les champs, il les bat comme la paille sur l'aire ; et, toujours dévoué, il chante en l'honneur de ses chefs nationaux un chant de triomphe qui s'étend depuis le mont Saint-Michel jusqu'aux vallées d'Elorn. Mais malheur au fils de ses princes que les étrangers, tout vaincus qu'ils sont, emmènent prisonnier au delà des mers ! L'infortuné meurt de chagrin loin du pays natal ; et la nuit, lorsque les âmes des martyrs du dévouement à la patrie viennent, à la clarté de la lune, sous la forme d'oiseaux blancs et noirs, avec une tache rouge au front, se percher sur un chêne au bord de la mer, et chanter, il ne chante pas : « Chantez, petits oiseaux, dit-il d'une voix douce et triste, vous n'êtes pas morts loin de la Bretagne ! »

    « Malheur bientôt au peuple lui-même ! ses chefs de race disparaissent, sa jeunesse commence, rude, à l'école de princes étrangers. […]. »

    N. B. : nous ne reproduisons pas supra, dans aucun des extraits cités, les notes de bas de page du texte original.

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  • Auteur : Xxx.
  • BEOWULF — Une épopée anglo-saxonne du VIIIe (?) siècle

    • NOTES LIMINAIRES •

    Le Beowulf, épopée, légende moyenâgeuse, contant les exploits d'un héros scandinave est l'un des textes fondamentaux de la littérature anglaise, rédigé au huitième siècle (?) par un poète anonyme de Northumbrie (?).

    Ainsi se place-t-il donc au commencement de la littérature anglaise, et en constitue une pièce essentielle : la plus ancienne épopée, le plus ancien roman. Ce poème met en scène de grands personnages seulement, de nobles guerriers, de nobles dames (ou n'évoque que des artisans divins) et, qui leur sont opposés, des êtres monstrueux.

    C'est un poème narratif, de plus de trois mille versets, et rédigé, du moins sous la forme que nous lui connaissons, dès le début du huitième siècle peut-être, voire plus tôt, ou au neuvième, dans une langue purement germanique encore.

    Et ce poème, comme tous ceux écrits en Grande-Bretagne aux septième, huitième siècles, porte l'empreinte d'un paganisme foncier. Tous les éléments à connotations chrétiennes sont ici, comme dans tous les poèmes anglais de ces temps éloignés, des éléments constitués d'ajouts postérieurs à la « création » de l'œuvre originale.

    Navire viking.

    Voici des commentaires plus précis concernant le Beowulf ; il sont extraits de la Préface écrite par Léon Botkine en prélude à sa traduction du texte en question :

    « De tous les monuments de la littérature anglo-saxonne qui sont parvenus jusqu'à nous le plus curieux est sans contredit le poëme épique de Beowulf. Après être resté longtemps plongé dans un injuste oubli il a enfin pris la place honorable à laquelle sa valeur réelle non moins que son ancienneté lui donnait droit. Beowulf peut être considéré non-seulement comme le plus ancien de tous les poèmes de chevalerie mais encore comme l'une des premières manifestations littéraires de l'Europe moderne ; à ce dernier titre surtout il a droit à notre intérêt. Sans doute quand on en examine le contenu en détail on ne peut souvent s'empêcher de critiquer l'agencement de ses parties et le style ampoulé dans lequel il est écrit, mais ces défauts très réels ne sauraient faire oublier l'importance qu'a pour nous cette épave littéraire au double point de vue philologique et historique. Le tissu du poëme lui-même n'est pas à dédaigner et bien qu'on ait penché d'abord aie regarder comme entièrement fabuleux, on croit pouvoir maintenant y démêler un fonds de vérité historique (1).

    « Les recherches persévérantes des philologues ne nous permettent pas de douter que Beowulf n'ait été écrit vers le VIIe ou le VIIIe siècle et que la forme sous laquelle nous le connaissons (par un manuscrit du Xe siècle) ne soit assez différente de celle que lui avait donnée son auteur : mais en quelle mesure les remaniements et les fautes des copistes en ont-ils altéré la substance, c'est ce que personne ne peut dire. L'auteur parle souvent comme s'il avait été contemporain des événements qu'il décrit ou comme s'il en avait entendu parler par des témoins oculaires, ce qui n'est évidemment qu'une licence poétique. On ne s'expliquerait pas du reste les anachronismes qui abondent dans le poëme si l'on ne se disait que Beowulf est une œuvre foncièrement païenne et faisant partie du répertoire mythique commun à toute l'Allemagne, mais remaniée et en plus d'un point défigurée par des mains chrétiennes (et d'autres disent aussi danoises).

    « L'original du Beowulf n'a été trouvé que dans un seul manuscrit qu'on croit être du Xe siècle (1). On le trouve mentionné pour la première fois dans le Catalogus historico-criticus de Wanley qui date de 1705, mais on ne s'en est guère occupé avant 1786, époque à laquelle deux copies en furent faites, l'une d'après l'ordre du Danois Thorkelin, l'autre par Thorkelin lui-même (2). La traduction de Beowulf que ce savant avait faite dès 1805 ayant été brûlée pendant le bombardement de Copenhague par les Anglais, il en fit paraître une nouvelle en 1815 sous les auspices de M. de Bülow que, dans sa reconnaissance, il appelle son Mœcenas optime, Sharon Turner (History of the Anglo-Saœons, t III. p. 326) adresse à ses compatriotes des reproches mérités sur le peu de diligence dont ils ont fait preuve en cette occasion : «  On peut blâmer notre patriotisme, dit-il, de ce que, alors que tant de travail et tant d'argent ont été employés à imprimer aux frais du public de nombreuses reliques du passé — et parfois des reliques de fort peu d'utilité — nous ayons laissé imprimer par un étranger et dans une contrée étrangère ce curieux monument de nos ancêtres. » — L'édition de Thorkelin est à vrai dire très défectueuse, surtout si on la considère à la lumière des dernières recherches philologiques, ce qui n'empêche pas que nous devions une grande reconnaissance à l'homme qui a exhumé le précieux poème. Depuis 1815 il a paru de ombreuses éditions de Beowulf en Angleterre, en Allemagne et en Danemark (1). En outre de ces éditions qui se recommandent toutes par quelque avantage spécial il paraît de temps à autre des études critiques sur des points isolés du poëme soit dans la Germania, soit dans le Journal de philologie allemande, soit même dans une feuille imprimée en langue danoise le Tidskrift for Philologi og Paedagogik.

    « Dans le but de faciliter l'intelligence du poëme je crois devoir en donner ici un résumé, en laissant de côté toutefois les faits qui ne se rapportent pas directement au héros, le Goth Beowulf.

    « […] ».

    (In : Beowulf. Épopée Anglo-Saxonne. Traduite en français, pour la première fois, d'après le texte original par L. Botkine. Havre : Imprimerie Lepelletier, 1877. 108 p. P. 13-15).

    N. B. : nous ne reproduisons pas supra, dans l'extrait cité, les notes de bas de page du texte original.

    Nous ne vous proposons pas de lire maintenant le résumé du Beowulf rédigé par L. Botkine qui nous semble trop long et détaillé pour figurer ici, mais d'en lire plutôt un autre, beaucoup plus court, que nous avons composé pour l'occasion :

    Le Beowulf nous conte les exploits d'hommes dignes, fiers, courageux, hardis, intrépides. Il nous conte les hauts faits de Beowulf, un Goth audacieux, il nous conte comme il fait équiper un navire et vient de Suède au Danemark porter secours au roi Hrothgar, dont la demeure, les biens, les domaines sont ravagés par un monstre de forme apparemment (plus ou moins) humaine, et que l'on nomme Grendel…

    Mais si Beowulf vient secourir Hrothgar, et celui-ci le rappelle au héros (qui se fait gloire, avec orgueil, d'avoir accompli maints exploits et promet de tenter d'en accomplir d'autres) ce n'est pas seulement par goût de l'aventure, pour prouver sa grande valeur, c'est aussi parce que ce valeureux héros a hérité de son père décédé une dette d'honneur à l'égard du roi des Danois.

    Lors d'un terrible combat Beowulf arrache un bras, épaule comprise, du monstrueux Grendel. Mortellement blessé Grendel parvient pourtant à s'échapper et à rejoindre une lointaine caverne marine où il s'abrite.

    La joie et le bonheur sont revenus dans la grande salle du palais de Hrothgar ; mais s'évanouissent bientôt : la monstrueuse mère de Grendel survient, assoiffée de vengeance !

    Elle enlève l'un de ces nobles Danois qui ont combattu son fils et l'ont, en définitive, tué. Beowulf la poursuit jusqu'en son refuge marin. Et après avoir triomphé du fils, il triomphe de la monstrueuse mère. Il découvre dans la caverne, qui servait de gîte aux monstres, le cadavre de Grendel ; il lui tranche la tête, et la porte à Hrothgar.

    De retour en son pays, Beowulf sera un jour proclamé roi. Après un règne long et heureux, Beowulf, blanchi par l'âge, doit pourtant affronter un autre grand et effroyable danger : un dragon. Beowulf l'emporte sur cet autre monstre… Mais, peu après sa victoire, il meurt des suites de ses blessures.

    Alors les Goths érigent au roi défunt un colossal tumulus, à son sommet un bûcher funéraire ; et autour du bûcher résonnent de grandes lamentations, et des pleurs, les plus amers.

    Avant que vous ne progressiez davantage dans la lecture de cette page nous estimons utile de vous fournir quelques précisions…

    Le texte original du Beowulf est écrit en vieil-anglais (old english). En vieil-anglais le tutoiement existait. Certains traducteur du texte en anglais moderne substituent systématiquement au tutoiement originel l'espèce de vouvoiement depuis longtemps habituel en anglais, ce qui rend parfois dans certains passages du texte, l'identification du destinataire, ou des destinaires, de certaines apostrophes d'un personnage, difficile ou conjecturale.

    Nous donnons ci-dessous, sous forme d'un extrait d'un livre de grammaire anglaise de pertinents éclaircissements relativement au tutoiement en langue anglaise…

    EXTRAITS DE : BERLAND-DELÉPINE, S. Grammaire pratique de l'anglais. Gap : Ophrys, 1990. 414 p. :

    P. 31, §14-e :

    « La 2e personne du singulier ne s'emploie plus dans la langue courante (parlée ou écrite) depuis plusieurs siècles. Elle est remplacée par la 2e personne du pluriel. L'anglais n'a donc ni tutoiement, ni pluriel de politesse. L'emploi des prénoms entre amis correspond un peu à notre tutoiement.

    « La 2e personne du singulier ne subsiste qu'en poésie et dans les textes religieux, pour la plupart composés à l'époque de la Réforme, où Dieu est tutoyé.

    « Principales formes :

    « thou art, thou wast

    « thou hast, thou hadst

    « thou dost, thou didst

    « thou shalt, thou wilt

    « Pour les verbes ordinaires, le suffixe est -est, ou -st (thou playest, thou lovest).

    « Pronoms : sujet thou […], complément thee […], réfléchi thyself.

    « Possessif : adjectif thy […], pronom thine […].

    « Love thy neighbour as thyself. Aime ton prochain comme toi-même.

    « Our Father, wich art in heaven, hallowed be thy nameNotre père qui es aux cieux que ton nom soit sanctifié

    « Thou sholt not kill. Tu ne tueras point.

    « Voir aussi 79 (2e exemple). »

    P. 56, §79 (2e exemple) :

    « Wilt thou have this woman to be thy lawful wedded wife… ?I will (formule rituelle de la cérémonie de mariage, à la 2e personne du singulier, 14). »

    (Copyright © Ophrys, 1990).

    À propos, toujours, du vouvoiement en anglais moderne, nous pouvons lire chez Brillat-Savarin (dans Physiologie du goût ou Méditations de gastronomie transcendante) une intéressante note de bas de page :

    « On ne se tutoie pas en anglais ; et un charretier tout en ruant son cheval de coups de fouet, lui dit : « Go, sir ; go, sir, I say (allez, monsieur, allez, monsieur, vous dis-je). » »

    Funérailles d'un chef viking.

    Par ailleurs…

    Certains lecteurs se poserons peut-être la question de savoir quelle est la nature du monstrueux Grendel et de sa mère, si tant est que le poème épique du Beowulf relève, par cet aspect éminemment énigmatique, aussi, de l'histoire, tout autant que de la légende.

    En effet il pourrait, il pourra venir à l'esprit que Grendel, et sa mère, étaient, peut-être, des hominoïdes reliques.

    Les études cryptozoologiques en Occident étant relativement moins avancée, qu'en Russie, qu'en ex-U.R.S.S., n'ont connu ici, ne connaissent encore ici que peu d'échos.

    Cette science fut trop longtemps négligée sous nos cieux ; ces études cryptozoologiques semblent, ici, malgré quelques rares pionniers ayant tenté de s'intéresser à cette matière ardue encore souvent moquée et blâmée, mais semblant susciter actuellement l'engouement d'universitaires de plus en plus nombreux, manquer toutefois cruellement de matériaux.

    Il est une adaptation, romanesque, et filmographique, du Beowulf ayant exploité une hypothèse cryptozoologique. Ce roman, ce film, que nous évoquons furent titrés, notamment,  « Le 13e guerrier ».

    L'inspiration du roman de Michael Crichton repose, non seulement sur le Beowulf, mais pour une large part sur une libre interprétation de la relation d'Ahmad Ibn Fadlân (secrétaire d'un ambassadeur arabe venu de Bagdad jusque sur les rives de la Volga au Xe siècle de l'ère vulgaire) des funérailles d'un chef des Rous (vikings d'origine suédoise — des Varègues) ; le personnage principal du roman, du film, se trouve être précisément cet Ibn Fadlan, un « 13e guerrier », se joignant à un groupe de 12 vikings qui combattront non pas seulement un individu autre, mais une troupe, une peuplade autre, des monstres du brouillard

    Des éléments du roman de M. Crichton voient l'érudition le disputer à la fiction. Il convient donc de lire le texte avec un certain détachement et le lecteur très cultivé, à la mentalité de maître d'école, devra, peut-être, se montrer ou indulgent ou vigilant. L'auteur conclut sa postface (rédigée en 1992…) en apportant précisions et mises en garde :

    « […]. Mais ces modes universitaires n'étaient pas prédominantes il y a vingt ans, quand j'entrepris d'écrire ce roman sous forme de monographie érudite, et elles peuvent changer de nouveau dans l'avenir — surtout si les érudits se lancent à la recherche de notes imaginaires ainsi que je l'ai fait.

    « En ces circonstances, je devrais peut-être préciser que les notes de cette postface sont authentiques. Le reste du roman, y compris l'introduction, le texte, les notes et la bibliographie, doit être considéré comme de la fiction.

    « Lors de la première publication des Mangeurs de Morts, cette version fantaisiste de Beowulf fut fraîchement accueillie par la critique, comme si j'avais profané un monument sacré. Mais les érudits spécialistes de Beowulf ont semblé prendre plaisir à sa lecture, et beaucoup ont pris la plume pour le dire.

    « M.C.

    « Décembre 1992 »

    (Copyright © Pocket, 1994).

    N. B. : le roman de Michael Crichton dont il est question ici (et dont le tire original est Eaters of the Dead) fut publié en France à plusieurs dates et sous plusieurs titres :

    CRICHTON, Michael. Le Royaume de Rothgar. Traduction de Lisa Rosenbaum. Paris : Mazarine, 1982. 250 p.

    CRICHTON, Michael. Le 13e guerrier. Traduction de Lisa Rosenbaum. Paris : Pocket, 1994. 157 p.

    CRICHTON, Michael. Les Mangeurs de morts. Traduction de Lisa Rosenbaum. Paris : Pocket, 2005 (…). 157 p.

    Dans le registre cryptozoologique dont nous traitons donc superficiellement, nous indiquons au lecteur curieux souhaitant en apprendre un peu plus sur ce sujet, ô combien digne d'intérêt, certaines références de textes qu'il sera susceptible de compulser, de lire avec profit, nous n'en doutons pas (la lecture des articles de M.-J. Koffmann parus dans les pages de la revue Archéologia est à privilégier tout particulièrement) :

    KOFFMANN, Marie-Jeanne. L'Almasty - Yéti du Caucase. Archéologia, juin 1991, n° 269, p. 24-43.

    KOFFMANN, Marie-Jeanne. L'Almasty du Caucase - Mode de vie d'un hominoïde. Archéologia, février 1992, n° 276, p. 52-65.

    KOFFMANN, Marie-Jeanne. Les Hominoïdes reliques dans l'Antiquité. Archéologia, décembre 1994, n° 307, p. 33-41.

    KOFFMANN, Marie-Jeanne. Les Hominoïdes reliques dans l'Antiquité (2e partie). Archéologia, janvier 1995, n° 308, p. 56-66.

    HEUVELMANS, Bernard ; PORCHNEV, Boris. L'Homme de Néanderthal est toujours vivant. Paris : Plon, 1974. 506 p.

    ROCHE, Jean. Sauvages et velus - Yéti, Sasquash, Almasty, Barmanou, Bigfoot… - Enquête sur des êtres que nous ne voulons pas voir. Chambéry : Exergue, 2000. 220 p.

    DEBENAT, Jean-Paul. Sasquatsh et le mystère des hommes sauvages - Cryptozoologie et mythologie(s) dans le Pacifique Nord-Ouest. Agnières : Le Temps Présent [JMG], 2007. 453 p. (Coll. : Champ limite).

    CAPART, André ; CAPART, Denise. L'Homme et les déluges. Bruxelles : Hayez, 1986. 338 p. (Voir plus particulièrement, relativement au sujet qui ici nous intéresse tout spécialement, le chapitre III – p. 73-129).

    Illustrations de ce paragraphe :
    — Première illustration : « Fig. 27. — Fragment de la Tapisserie de Bayeux,
    lequel représente la construction des nefs du duc Guillaume (avec la bordure). ».
    In : LACROIX, Paul. Les arts au Moyen-Âge et à l'époque de la Renaissance.
    Cinquième édition. Paris : Librairie de Firmin Didot Frères, Fils et Cie, 1874. 548 p. P. 45.
    — Seconde illustration ; in : Harper's Young People - An Illustrated Weekly (Un illustré hebdomadaire).
    New York : Harper's & Brother. Vol. I - N° 14. Tuesday, February 3 (mardi 3 février), 1880. P. 161.
    Il s'agit de l'une des illustrations (p. 161 ; illustrateur non identifié dans la publication)
    d'un article (p. 162 ; auteur non identifié dans la publication)
    intitulé : « Ships Past and Present »
    (Navires du temps passé et du temps présent) ;
    la légende de l'illustration : « Norwegian ship of the tenth century »
    (Navire norvégien du Xe siècle) ;
    les premiers européens, des Vikings, ayant foulé le sol du Nouveau Monde,
    furent en effet des Norvégiens ; souvenons-nous toutefois que Beowulf est Suédois,
    et se rend, a priori, du Götaland au Danemark, et ce bien avant le Xe siècle.
    [Source : https://www.mirrorservice.org/sites/gutenberg.org/2/8/3/4/28344/28344-h/28344-h.htm]


    N. B. : numérisation : Bodleian Library (Bibliothèque bodléienne) – Université d'Oxford ; téléchargement depuis : https://fr.wikisource.org (au format djvu ; puis conversion au format pdf, puis en lot Abbyy Finereader — nettoyage, ocr, conversion au format pdf).

    BEOWULF - ÉPOPÉE ANGLO-SAXONNE — (+++++) —

    Voici comment débute la traduction du Beowulf par Léon Botkine (p. 29, 30) :

    « Eh quoi ! nous avons entendu parler de la valeur des rois qui gouvernèrent jadis les Danois des Lances et de l’héroïsme dont firent preuve ces princes ! Souvent Scyld, fils de Scef, remporta la victoire sur des foules d’ennemis et de nombreuses tribus. Lui qui avait été jadis recueilli dans le dénûment, il devint un redoutable seigneur; ses malheurs furent réparés, car il grandit, sa renommée s’étendit dans le monde et un jour vint où tous ses voisins lui furent soumis et lui envoyèrent le tribut par-dessus les mers. Oui, c’était un excellent roi ! — Il eut un enfant que Dieu envoya pour être la consolation de ses sujets, car le Seigneur avait été témoin des maux que leur avaient causés pendant bien longtemps leurs ennemis.

    « C’est pourquoi Dieu leur donna de la gloire en ce monde. Beowulf fut célèbre ; le nom du descendant de Scyld retentit au loin dans le Scedeland. (C’est ainsi qu’il sied à un jeune guerrier de se montrer prodigue de bienfaits et de trésors envers les amis de son père afin que, dans sa vieillesse, il trouve aussi des compagnons volontaires qui puissent le servir en cas de guerre: ainsi sa renommée grandira dans chaque tribu par des actions d’éclat).

    « Quand le moment fatal fut venu Scyld partit, sous la garde de Dieu, pour le long voyage. Ses chers compagnons le portèrent à la mer, ainsi qu’il l’avait ordonné pendant qu’il régnait ; — son temps de puissance avait été long. Dans le port se trouvait une barque bien équipée, — la barque du roi. Ils y placèrent, près du mât, leur souverain. La barque était remplie d’objets précieux et de trésors venant de lointains pays. Jamais, à ma connaissance, esquif ne reçut une plus belle parure d’armes et d’habits de guerre : cette masse de trésors devait partir avec lui sur les flots. Il ne furent pas moins prodigues de dons envers lui que ne l’avaient été ceux qui l’avaient livré seul, après sa naissance, au caprice des vagues. — Ils firent flotter une bannière d’or au-dessus de sa tête, puis l’abandonnèrent à la mer. L’esprit tout rempli de tristesse ils n’auraient pu dire en vérité qui recevait la charge du navire. »

    N. B. : nous ne reproduisons pas supra, dans l'extrait cité, ni les appels de notes ni les notes elles-mêmes se rapportant au texte original.

    Funérailles d'un chef viking.

    L'illustration de ce paragraphe est due à Johann Gehrts (1855-1921) ;
    la légende en est : « Wikinger-Bestattung » (Funérailles vikings)
    in : HEIMS, Paul Gerhard. Seespuk: Aberglauben, Märchen, und Schnurren in Seemannskreisen gesammelt und bearbeitet.
    Leipzig : Ferdinand Hirt & Sohn, 1888. 208 p. Planche entre les p. 172 et 173.
    [Source : https://archive.org]

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    N. B. : numérisation : Internet Archive - University of Toronto (Université de Toronto) ; téléchargement depuis : archive.org.

    LE POÈME ANGLO-SAXON DE BEOWULF - Introduction - Texte et traduction - Grammaire - Lexique — (+++++) —

    Voici un extrait de la traduction du Beowulf par Hubert PIERQUIN (p. 393-395) :

    « Ainsi le fils d’Healfdene sans trêve, coulait des jours pleins de chagrin ; le prudent héros ne pouvait détourner la ruine ; la lutte était trop dure, décourageante et vaine pour le peuple auquel elle s’imposait, avec l’inévitable fléau de malice infernale, le plus grand des maux de la nuit.

    « De son pays, le féal d’Hygelac l’apprit; vaillant parmi les Geats, il sut les forfaits de Grendel : pendant les jours de sa vie, il était le premier en force, de la race des hommes ; … noble et bien développé. Il ordonna qu’on lui équipât un bon vaisseau : et il disait qu’il allait chercher le roi de guerre, sur le sillage du cygne ; puisque ce prince renommé avait besoin d’hommes. Les sages conseillers blâmaient quelque peu cette entreprise, quoique le héros leur fût cher : ils donnaient de pénétrants avis… , et ils consultaient les présages. Le bon chef avait choisi parmi les guerriers du peuples des Geats, les plus vaillants de ceux qu’il avait pu trouver. Avec quinze de ces hommes, il alla prendre les rames de mer ; un guerrier, homme expert à naviguer sur les lacs, leur indiquait les limites des terres.

    « Le temps passa, et le vaisseau flottait sur les vagues, et sous une montagne ; les hardis guerriers s’avançaient sur la proue. Ils tourbillonnaient dans les courants, luttaient en mer contre les sables : les hommes portaient au cœur de la barque, les brillants ornements, leurs fières armures de guerre. Ils ramaient à l’envi, … pour achever le voyage dont ils souhaitaient le terme. Puis semblable à un oiseau, le navire cerclé d’écume, poussé par le vent, bondissait sur les vagues profondes de la mer, jusqu’à la première heure environ du second jour, où fut accomplie la traversée par le vaisseau à la proue couronnée : alors les voyageurs purent voir la terre, les falaises et les montagnes abruptes qui brillaient, et les promontoires indéfinis. Donc la mer avait été franchie, et ils étaient au bout de leurs peines. »

    Navire viking bravant les profondes vagues de la mer.

    Illustration d'August Malmström.
    Illustration (vue fragmentaire), in : TEGNÉR, Isaias. Frithiofs Saga.
    Chicago : The Engberg-Holmberg Publishing Co, 1909.
    XXIV p. et 200 p. P. 74.
    [Source : https://archive.org/details/frithiofssaga00tegngoog]

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  • Traducteur-commentateur : Lesslie Hall.
  • BEOWULF - AN ANGLO-SAXON EPIC POEM - TRANSLATED FROM THE HEYNE-SOCIN TEXT BY LESSLIE HALL — (+++++) —

    Voici un extrait de la traduction (traduction versifiée) en anglais (new english) du Beowulf (Beowulf, an Anglo-saxon Epic Poem) par John Lesslie HALL (p. 9-14) :

    « IV
    « […]
    « 40   Then well from the cliff-edge the guard of the Scyldings
    Who the sea-cliffs should see to, saw o'er the gangway
    Brave ones bearing beauteous targets,
    Armor all ready ; anxiously thought he,
    Musing and wondering what men were approaching.
    45   High on his horse then Hrothgar's retainer
    Turned him to coastward, mightily brandished
    His lance in his hands, questioned with boldness :
    "Who are ye men here, mail-covered warriors
    Clad in your corslets, come thus a-driving
    50   A high-riding ship o'er the shoals of the waters,
    And hither 'neath helmets have hied o'er the ocean ?
    I have been strand-guard, standing as warden,
    Lest enemies ever anywise ravage
    Danish dominions with army of war-ships.
    55   More boldly never have warriors ventured
    Hither to come ; of kinsmen's approval,
    Word-leave of warriors, I ween that ye surely
    Nothing have known. Never a greater one
    Of earls o'er the earth have / had a sight of
    60   Than is one of your number, a hero in armor;
    No low-ranking fellow' adorned with his weapons,
    But launching them little, unless looks are deceiving.
    And striking appearance. Ere ye pass on your journey
    As treacherous spies to the land of the Scyldings
    65   And farther fare, I fully must know now
    What race ye belong to. Ye far-away dwellers,
    Sea-faring sailors, my simple opinion
    Hear ye and hearken : haste is most fitting
    Plainly to tell me what place ye are come from."
    « V.
    « The chief of the strangers rendered him answer,
    War-troopers' leader, and word-treasure opened :
    "We are sprung from the lineage of the people of Geatland,
    And Higelac's hearth-friends. To heroes unnumbered
    5   My father was known, a noble head-warrior
    Ecgtheow titled ; many a winter
    He lived with the people, ere he passed on his journey,
    Old from his dwelling; each of the counsellors
    Widely mid world-folk well remembers him.
    10   We, kindly of spirit, the lord of thy people,
    The son of King Healfdene, have come here to visit,
    Folk-troop's defende : be free in thy counsels !
    To the noble one bear we a weighty commission,
    The helm of the Danemen ; we shall hide, I ween,
    15   Naught of our message. Thou know'st if it happen,
    As we soothly heard say, that some savage despoiler,
    Some hidden pursuer, on nights that are murky
    By deeds very direful 'mid the Danemen exhibits
    Hatred unheard of, horrid destruction
    20   And the falling of dead. From feelings least selfish
    I am able to render counsel to Hrothgar,
    How he, wise and worthy, may worst the destroyer,
    If the anguish of sorrow should ever be lessened,
    Comfort come to him, and care-waves grow cooler,
    25   Or ever hereafter he agony suffer
    And troublous distress, while towereth upward
    The handsomest of houses high on the summit."
    Bestriding his stallion, the strand-watchman answered,
    The doughty retainer : "The difference surely
    30   'Twixt words and works, the warlike shield-bearer
    Who judgeth wisely well shall determine.
    This band, I hear, beareth no malice
    To the prince of the Scyldings. Pass ye then onward
    With weapons and armor. I shall lead you in person ;
    35   To my war-trusty vassals command I shall issue
    To keep from all injury your excellent vessel,
    Your fresh-tarred craft, 'gainst every opposer
    Close by the sea-shore, till the curved-necked bark shall
    Waft back again the well-beloved hero
    40   O'er the way of the water to Weder dominions.
    To warrior so great 'twill be granted sure
    In the storm of strife to stand secure."
    Onward they fared then (the vessel lay quiet.
    The broad-bosomed bark was bound by its cable,
    45   Firmly at anchor) ; the boar-signs glistened
    Bright on the visors vivid with gilding,
    Blaze-hardened, brilliant ; the boar acted warden.
    The heroes hastened, hurried the liegemen,
    Descended together, till they saw the great palace,
    50   The well-fashioned wassail-hall wondrous and gleaming :
    'Mid world-folk and kindreds that was widest reputed
    Of halls under heaven which the hero abode in ;
    Its lustre enlightened lands without number.
    Then the battle-brave hero showed them the glittering
    55   Court of the bold ones, that they easily thither
    Might fare on their journey; the aforementioned warrior
    Turning his courser, quoth as he left them :
    " 'Tis time I were faring ; Father Almighty
    Grant you His grace, and give you to journey
    60   Safe on your mission ! To the sea I will get me
    'Gainst hostile warriors as warden to stand."
    « VI.
    « The highway glistened with many-hued pebble,
    A by-path led the liegemen together.
    Firm and hand-locked the war-burnie glistened,
    The ring-sword radiant rang 'mid the armor
    5   As the party was approaching the palace together
    In wariike equipments. 'Gainst the wall of the building
    Their wide-fashioned war-shields they weary did set then,
    Battle-shields sturdy; benchward they turned then ;
    Their battle-sarks rattled, the gear of the heroes;
    10   The lances stood up then, all in a cluster,
    The arms of the seamen, ashen-shafts mounted
    With edges of iron : the armor-clad troopers
    Were decked with weapons. Then a proud-mooded hero
    Asked of the champions questions of lineage :
    15   "From what borders bear ye your battle-shields plated,
    Gilded and gleaming, your gray-colored burnies,
    Helmets with visors and heap of war-lances ? —
    To Hrothgar the king I am servant and liegeman.
    'Mong folk from far-lands found I have never
    20   Men so many of mien more courageous.
    I ween that from valor, nowise as outlaws,
    But from greatness of soul ye sought for King Hrothgar."
    Then the strength-famous earlman answer rendered,
    The proud-mooded Wederchief replied to his question,
    25   Hardy 'neath helmet: "Higelac's mates are we ;
    Beowulf hight I. To the bairn of Healfdene,
    The famous folk-leader, I freely will tell
    To thy prince my commission, if pleasantly hearing
    He'll grant we may greet him so gracious to all men."
    30 Wulfgar replied then (he was prince of the Wendels,
    His boldness of spirit was known unto many,
    His prowess and prudence) : "The prince of the Scyldings,
    The friend-lord of Danemen, I will ask of thy journey,
    The giver of rings, as thou urgest me do it,
    35   The folk-chief famous, and inform thee early
    What answer the good one mindeth to render me."
    He turned then hurriedly where Hrothgar was sitting,
    Old and hoary, his earlmen attending him ;
    The strength-famous went till he stood at the shoulder
    40   Of the lord of the Danemen, of courteous thanemen
    The custom he minded. Wulfgar addressed then
    His friendly liegelord : "Folk of the Geatmen
    O'er the way of the waters are wafted hither,
    Faring from far-lands : the foremost in rank
    The battle-champions Beowulf title.
    They make this petition : with thee, O my chieftain,
    To be granted a conference; O gracious King Hrothgar,
    Friendly answer refuse not to give them !
    In war-trappings weeded worthy they seem
    Of earls to be honored; sure the atheling is doughty
    Who headed the heroes hitherward coming." »

    Le Goth Beowulf.

    « […] the boar-signs glistened
    « Bright on the visors vivid with gilding,
    « Blaze-hardened, brilliant : the boar acted warden. »
    (J. L. Hall)

    (« Le signe du sanglier brillait sur les visières ; le sanglier montait la garde. »)
    (L. Botkine)

    Et voici comment Léon BOTKINE traduit (en prose), en français quant à lui, le même passage du Beowulf (Beowulf. Épopée Anglo-Saxonne. Traduite en français, pour la première fois, d'après le texte original par L. Botkine. Havre : Imprimerie Lepelletier, 1877. 108 p. P. 34-36) :

    « IV

    «  […].

    « Le garde-côte des Scyldingas vit du rivage les brillants boucliers et les équipements que l’on portait à terre ; dans sa curiosité il chercha à deviner par des conjectures qui étaient ces hommes. Le serviteur de Hrothgar se rendit alors à cheval au rivage, puis secouant sa lance avec force, leur adressa ces questions :

    « « Qui êtes-vous donc, vous qui conduisez ainsi, couverts de cottes de mailles et de parures guerrières, ce haut navire par dessus le détroit de la mer ? Je suis le gardien de la côte et je dois veiller à ce qu’aucune flotte ennemie ne vienne ravager le pays des Danois. Jamais troupe guerrière n’est encore venue ici plus librement ; cependant vous ignorez complètement si vous pouvez obtenir la permission de nos guerriers. — Jamais je n’ai vu un plus puissant chevalier que celui qui est au milieu de vous avec ses habits de guerre ; un homme vulgaire ne porterait pas de pareilles armes ; il doit être intrépide si son apparence ne me trompe pas. — Maintenant il me faut savoir votre origine avant que vous fassiez un pas de plus sur la terre des Danois. Écoutez donc mon simple conseil, ô habitants d’une région lointaine et navigateurs de la mer, mieux vaut dire au plus tôt le pays d’où vous venez ! »

    « V

    « Le chef de la troupe répondit :

    « « Nous sommes de la nation des Goths et des serviteurs de Hygelac. Mon père était célèbre parmi les peuples ; on l’appelait Ecgtheow ; il eut de longs jours et tous les sages de la terre se rappellent de lui. — Nous venons, dans un esprit de fidélité, trouver ton maître, le fils de Healfdene : puissent tes instructions nous être favorables ! Nous apportons au seigneur des Danois un message important, mais rien n’en doit être caché, je pense. Tu dois savoir, si ce que nous avons entendu dire est vrai, que pendant les nuits obscures un ennemi inconnu manifeste sa haine contre les Scyldingas par la dévastation et le meurtre. Je peux donner un bon conseil à Hrothgar à ce sujet et l'aviser de la manière de terrasser l’ennemi : il faut savoir si le temps de tribulation peut cesser pour faire place à des jours meilleurs, ou bien s’il faut toujours que Hrothgar endure des souffrances tant que demeurera sur ses fondements le plus beau des édifices. »

    « Le gardien de la côte répondit :

    « « Tout bon guerrier doit connaître la différence qui existe entre les paroles et les actes. J’entends dire que cette troupe est dévouée au seigneur des Scyldingas : venez, je vous servirai de guide. Je vais donner l’ordre à mes gens de bien garder votre barque contre tous les ennemis, afin qu’elle puisse porter de nouveau votre chef quand il retournera à la frontière des Wederas. Puisse-t- il être donné à un si vaillant guerrier de traverser sans accident la mêlée des batailles ! »

    « Ils partirent alors. — Le navire resta immobile, attaché à ses cordes, ferme sur son ancre. — Le signe du sanglier brillait sur les visières ; le sanglier montait la garde. — Les guerriers marchèrent ensemble rapidement jusqu’au moment où il purent apercevoir Heort (c’était le plus beau des édifices sous le ciel et c’est là que se tenait Hrothgar ; l’éclat de la salle se répandait sur de nombreux pays). Le gardien de la côte le leur montra, afin qu’ils pussent s’y rendre seuls, puis, faisant tourner bride à son cheval, il leur dit ces paroles :

    « « Il est temps que je parte. Que la grâce du Père tout-puissant vous garde en santé pendant vos entreprises ! Moi, je me rends à la mer pour monter la garde contre les ennemis. »

    « VI

    « La route était bigarrée de pierres ; elle indiquait la direction aux guerriers. La cotte de mailles brillait, l’épée luisante chantait en se choquant contre les armures. Tout à coup ils arrivèrent à la salle. Ils disposèrent leurs larges boucliers contre le mur, puis se dirigèrent vers le banc. Un homme vint alors leur demander quelle était leur nation :

    « De quel endroit apportez-vous ces boucliers, ces chemises d’armes, ces casques et cette masse de lances ? — Je suis l’envoyé et le serviteur de Hrothgar. Je n’ai pas encore vu un plus grand nombre de braves étrangers. J’espère que la hardiesse de votre esprit, et non la contrainte, vous a poussés à venir trouver Hrothgar. »

    « Le prince des Goths répondit :

    « Nous sommes les compagnons de table de Hygelac ; mon nom est Beowulf. Je veux délivrer mon message au fils de Healfdene si, toutefois, il nous accorde la faveur de le saluer. »

    « Wulfgar, prince des Wendlas (il était renommé pour sa sagesse et sa vaillance) dit alors :

    « Je vais exposer ta requête au roi des Danois et lui parler de ton voyage, et je t’apporterai de suite la réponse qu’il me fera. »

    « Il alla aussitôt à l’endroit où siégeait le vieux Hrothgar avec sa compagnie de nobles, et se plaçant sur le côté du roi (car il connaissait l’étiquette) :

    « Il y a ici, dit-il, des Goths qui sont venus de loin en traversant la mer ; ils nomment le principal d’entre eux Beowulf. Ils sollicitent de s’entretenir avec toi, ô mon prince ! ne leur refuse pas la faveur d’une réponse. Ils paraissent être de braves guerriers ; leur chef surtout est excellent. »

    Illustration de ce paragraphe,
    légendée « Beowulf the Goth » (Le Goth Beowulf),
    in : Beowulf, an Old English Epic –
    The Earliest Epic of the Germanic Race
    .
    Traduction de Wentworth Huyshe.
    New York : George Routledge & Sons, 1907. 216 p.
    [Source — probable — de l'illustration :
    http://www.paddletrips.net/beowulf/html/beorefs/beowulf-cover-huys-900.jpg]

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    THE DEEDS OF BEOWULF - AN ENGLISH EPIC OF THE EIGTH CENTURY DONE INTO MODERN PROSE — (+++++) —

    Nous vous proposons de lire maintenant un extrait de la traduction de John Earle (p. 19-22 ; dans le palais de Heoroth, Wealhtheow, l'épouse du roi Hrothgar, honore Beowulf en lui servant à boire:

    « « As repeatedly as the spiteful assailants shrewdly pressed me, I served them (liberally) with precious sword as was meet. They did not have their slaughterous revel, the foul brigands, that they should eat me up sitting around their supper, by the floor of the sea ; but (on the contrary) next morning, wounded with weapons along the wrack of the wave, they lay high and dry ; by swords they had their quietus, so that never afterwards about the swelling highway should they let seafaring men of their destined course.

    « Light came from the East, the bright signal of God ; the waves grew calm, so that I was able to see the forelands, the windy walls. Fortune often rescues the warrior, if he is not fated to die ; provided that his courage is sound ! Anyhow 'twas my good luck, that I slew with the sword nine nicors. Never did I hear of a harder fight under heaven's roof in the nighttime, nor of a man more distressed in ocean streams ; howbeit I escaped the clutch of foes with my life, though worn and spent. Me the sea upcast, the swirling flood, upon the land of the Fins, the heaving billow. I never heard say aught by thee of such deadly fightings, sword-clashings : Brcca never yet, at war play, not he nor you, deed achieved so valorously with flashing swords — of that I brag not much — though thou wast banesman to thy brother, thy next of kin ; for which thou shalt in hell damnation dree, though doughty be thy wit. I say to thee of a sooth, thou son of Ecglaf, that never had Grendel the foul ruffian made such a tale of horrors for thy prince, such disgrace in Heorot, if thy courage were, if thy spirit were, so formidable as thou thyself claimest. But he hath found out that he need not greatly fear reprisals, grisly edge-clash, from your people, the mighty Scyldings ; he taketh blackmail, respecteth no one of the people of the Danes, but maketh a sport of war, slaughtereth and feasteth : — no thought hath he of a fight with the spear-Danes. But now shall the Goth show him erelong puissance and emprize in the way of war. After that, he who can shall go proud into the mead-hall, when over the sons of men the morning light of another day, the sun, with radiance clothed, shall shine from the south. »

    « Then was in bliss the dispenser of wealth, greyhaired and militant ; he believed in help ; the prince of the glorious Danes, the shepherd of the people, perceived in Beowulf a resolute purpose. There was laughter of mighty men ; music sounded ; the words (of song) were jovial.

    « Wealhtheow moved forward, Hrothgar's queen, mindful of ceremonies ; she greeted in her gold array the men in Hall ; and then the noble lady presented the beaker first to the sovereign of the east-Danes, wished him blithe at the banquet, and dear to his Leeds ; — he merrily enjoyed the feast and the Hall-cup, valiant king.Then the Helming princess went the round, to elder and to younger, every part ; handed the jewelled cup ; till the moment came, that she, the diademed queen, with dignity befitting, brought the mead-cup nigh to Beowulf ; she greeted the Leed of the Goths, she thanked God with wise choice of words, for that her desire was come to pass, that she in any warrior believed for remedy of woes. He, the death-doing warrior, accepted the beaker at Wealhtheow's hand, and then he descanted, elate for battle ; Beowulf son of Ecgtheow uttered speech : « I undertook that, when I went on board, and sate on the sea-boat, with the company of my fellows, that I once for all would work out the will of your Leeds, or fall in the death-struggle, in the grip of the fiend. I am bound as an eorl to fulfil the emprize, or in this mead-hall to meet my death-day. » To the lady the words were well-liking, the vaunt-speech of the Goth ; she walked gold-arrayed, high-born queen of the nation, to sit by her lord.

    « Then was again as erst within the hall the lofty word outspoken, the company was happy, the sound was that of a mighty people ; until that sudden the son of Healfdene was minded to retire to his nightly rest ; he knew that against the high Hall war was determined by the monster, from the time when they could [not] see the sun's light or shrouding night came over all, and the creatures of darkness came stalking abroad ; he warred in obscurity. All the company arose. Then did man greet man, Hrothgar greeted Beowulf, bespake him luck, mastery in the house of hospitality ; and delivered this speech : « Never before, since I could heave hand and shield, did I confide the guard-house of the Danes to any man, but only to thee now on this occasion. Have now and hold the best of houses ; resolve on success : show valour amain ; be vigilant against the foe ! Thou shalt not have any desire unfulfilled, if thou that mighty work with life achievest. » »

    Beowulf et la reine Wealhtheow, épouse de Hrotgar, roi des Danois.

    Voici comment Léon Botkine traduit en français (in : Beowulf. Épopée Anglo-Saxonne. Traduite en français, pour la première fois, d'après le texte original par L. Botkine. Havre : Imprimerie Lepelletier, 1877. 108 p. P. 40-42), l'extrait du Beowulf dont nous citons plus haut la traduction anglaise de John Earle :

    « C'est ainsi que, souvent, les ennemis mirent ma vie en péril. Je les traitai avec ma chère épée comme il était juste ; il n'eurent pas lieu de se réjouir et de m'avoir entraîné près du fond de la mer pour me dévorer, car le matin ils étaient étendus sans vie sur le rivage et désormais ils ne barrèrent plus la route à ceux qui naviguent sur la mer. La lumière se fit dans l'est, le brillant flambeau de Dieu parut ; les flots s'apaisèrent et je pus voir les promontoires marins et les côtes venteuses. Souvent le sort conserve la vie du brave ! Il me permit même de tuer avec mon épée neuf niceras. Je n'ai pas connaissance qu'on ait combattu plus rude combat la nuit sous la voûte des deux, ni qu'aucun homme ait été plus misérable sur les flots. Et cependant, quoique fatigué par le voyage, je sauvai ma vie de la griffe des ennemis. Les courants de la mer me portèrent sur le Finnaland. — Je n'ai jamais entendu dire que tu aies pris part à de semblables combats quoique tu sois le meurtrier de tes frères (tu souffriras pour ce fait la damnation dans l'enfer, bien que ton esprit soit subtil) ; jamais Breca, ni aucun de vous, n'a encore accompli dépareilles prouesses avec son épée (je ne m'en fais pas gloire.) Je te le dis en ;vérité, fils d'Ecglaf, jamais Grendel n'eut fait tant de maux à ton roi dans Heort si ton caractère était aussi belliqueux que tu le dis toimême. Mais il a vu qu'il n'avait pas besoin de craindre trop les épées de votre peuple ; il prend son tribut, il ne fait grâce à aucun Danois, il combat, dort et se gorge à plaisir sans redouter rien de vous. Bientôt cependant il aura affaire à la force et à l'héroïsme des Goths. — Que celui qui le pourra aille de nouveau prendre l'hydromel quand la lumière se fera demain sur les hommes et que le soleil brillera dans le sud ! »

    « Le prince des Beorht-Dene, ayant entendu ce discours, était heureux ; il se fiait à Beowulf dont il venait d'entendre les paroles résolues. Alors on entendit les rires des guerriers et les joyeux propos. Wealhtheow, l'épouse de Hrothgar, qui se rappelait les règles de l'étiquette, alla saluer les guerriers dans la salle, et la noble femme présenta d'abord la coupe au roi en lui disant de se réjouir au festin de la bière. Le roi prit joyeusement la coupe. La reine fit alors le tour de l'assistance et présenta la coupe aux chevaliers de tout rang ; le tour de Beowulf étant venu elle salua le prince Goth et remercia Dieu en de sages paroles de ce que le souhait qu'elle avait formé de pouvoir se confier dans un chevalier vengeur des crimes s'était accompli. Beowulf reçut la coupe des mains de Wealhtheow et, résolu au combat, il parla ainsi :

    « « J'étais résolu, en m'embarquant sur la mer avec mes compagnons, de faire prévaloir entièrement la volonté de votre peuple ou de périr et d'être saisi par les griffes de l'ennemi. Je ferai des actions d'éclat ou mes jours trouveront leur issue dans cette salle de festin. »

    « Ces paroles orgueilleuses du Goth plurent à la reine, qui alla prendre place auprès de son époux. Les conversations animées recommencèrent dans la salle jusqu'au moment où le fils de Healfdene se leva subitement pour aller prendre du repos ; il savait que le combat contre le monstre était résolu…. » Pendant qu'ils purent voir la lumière du soleil jusqu'à ce que la nuit obscure se fut faite dans le ciel. — Tout le monde se leva. Hrothgar salua alors Beowulf ; il lui délégua le pouvoir sur la salle et lui adressa ces paroles :

    « « Jamais depuis que j'ai pu lever la main et le bouclier je n'ai confié à un homme la salle des Danois, si ce n'est à toi. Garde maintenant le plus beau des édifices , montre-toi soucieux de la gloire ; fais des preuves de bravoure ; veille sur l'ennemi ! Tu ne manqueras pas de trésors si tu échappes la vie sauve à cette action ! » »

    L'illustration de ce paragraphe est de
    George T. Tobin, et se trouve légendée :
    « Queen Wealhtheow pledges Beowulf »
    (La reine Wealhtheow proposant de boire en l'honneur de Beowulf) ;
    in : RAGOZIN, Zenaïde Alexelevna. Tales of the Heroic Ages:
    Siegfried the Hero of the North, and Beowulf, the Hero of the Anglo-Saxons.
    New York : G. P. Putnam's Sons – The Knickerbocker Press, 1898. 332 p.
    Planche entre les p. 242 et 243.
    [Source : https://archive.org]

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    THE OLDEST ENGLISH EPIC - BEOWULF, FINNSBURG, WALDERE, DEOR, WIDSITH, AND THE GERMAN HILDEBRAND — (+++++) —

    Nous reproduisons ici l'essentiel de la PRÉFACE de l'ouvrage (les remerciements figurant en fin de la « Préface » ne sont pas reproduit ici) :

    « OLD English epic in the specific sense is that ancient and wholly heathen narrative poetry which Englishmen brought from their continental home and handed down by the agency of professional singers. The material thus accumulated either kept its original form of the short lay, fit for chant or recitation at a banquet, full of immediate effects, often dramatic and always vigorous, or else it was worked over into longer shape, into more leisurely considered and more leisurely appreciated poems. This second class is represented by Beowulf, the sole survivor in complete form of all the West-Germanic epic. Waldere, of which two brief fragments remain, seems also to have been an epic poem; like Beowulf, it has been adapted both in matter and in manner to the point of view of a monastery scriptorium. Finnsburg, on the other hand, so far as its brief and fragmentary form allows such a judgment, has the appearance of a lay. Its nervous, fiery verses rush on without comment or moral; and it agrees with the description of a lay which the court minstrel of Hrothgar sings before a festal throng, and of which the poet of Beowulf gives a summary. Not English at all, but closely related to English traditions of heroic verse, and the sole rescued specimen of all its kind in the old German language, is Hildebrand, evidently a lay. By adding this to the English material, one has the entire salvage from oldest narrative poetry of the West-Germanic peoples in mass. Finally, there are two lays or poems purporting to describe at first hand the life of these old minstrels, who either sang in permanent and well-rewarded office for their king, or else wandered from court to court and tasted the bounty of many chieftains. These two poems, moreover, contain many references to persons and stories of Germanic heroic legends that appear afterward in the second growth of epic, in the Scandinavian poems and sagas, in the cycle of the Nibelungen, Gudrun, and the rest. Such is the total rescue from oldest English epic that fate has allowed. It deserves to be read in its full extent by the modern English reader; and it is now presented to him for the first time in its bulk, and in a form which approximates as closely as possible to the original. »

    Notre traduction-adaptation du texte cité ci-dessus :

    « La vieille épopée anglaise, à proprement parler, est une poésie narrative de grande antiquité et tout à fait païenne que les Anglais ont apportée de leur foyer continental et transmise par l'intermédiaire de chanteurs professionnels. Le matériau ainsi accumulé a conservé sa forme originale, soit de lai court à chanter ou réciter lors d'un banquet, susceptible de produire instantanément des sensations, souvent dramatiques et toujours intenses, soit encore remaniée sous des formes plus longues, sous des formes destinées à être considérées de façon moins immédiate, de poèmes destinés à une appréciation plus réfléchie. Cette deuxième catégorie est représentée par Beowulf, le seul de ces textes au tour complet de toute l'épopée Ouest-Germanique. Waldere, duquel deux brefs fragments nous sont parvenus, semble également avoir consisté en un poème épique ; comme Beowulf, il fut remanié, à la fois en ce qui concerne le matériau et en ce qui concerne la manière, selon les artifices en vigueur au sein des scriptoria des monastères. Quant à Finnsburg, autant que sa forme brève et fragmentaire permette un tel jugement, ce texte possède les caractéristiques d'un lai. Ses versets fougueux, ardents affluent sans commentaire ou leçon de morale : et se trouve conforme au type de lai que chante le ménestrel de la cour de Hrothgar devant la foule d'un jour de fête, et dont le poète de Beowulf fournit un résumé. Point du tout anglais, mais étroitement lié aux traditions anglaises de la versification héroïque, et l'unique modèle sauvegardé de tout son genre en vieille langue germanique, est Hildebrand, de toute évidence un lai. En ajoutant ceci à la matière anglaise, on possède alors l'intégralité de l'ancienne poésie narrative conservée de la Germanie occidentale. Enfin, il y a deux lais ou poèmes pouvant prétendre décrire, témoignages directs, la vie de ces anciens ménestrels, chantres permanents et tenant un office convenablement rétribué par leur roi, ou encore se déplaçant de cour en cour et goûtant à la générosité de maints seigneurs. Ces deux poèmes, d'ailleurs, contiennent nombre de références aux personnes et aux histoires relevant des légendes héroïques germaniques apparaissant ensuite lors de la deuxième évolution de l'épopée, dans les poésies et les sagas scandinaves, dans le cycle des Nibelungen, de Gudrun, et d'autres encore. Telle est la totalité de l'épopée anglaise la plus ancienne dont le destin autorisa la sauvegarde. Elle mérite d'être lue en son intégralité par le lecteur anglais contemporain : et elle lui est maintenant présentée pour la première fois dans son entièreté, et sous une forme aussi proche que possible de l'original. »

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    N. B. : numérisation : Internet Archive - University of Toronto Library ; téléchargement depuis : archive.org.

    BEOWULF - AUTOTYPES OF THE UNIQUE COTTON MS. VITELLIUS A XV IN THE BRITISH MUSEUM — (+++++) —

    Nous vous proposons de lire ci-après un extrait d'un ouvrage en langue française, et des plus instructifs, sur le manuscrit du Beowulf, comportant un très riche outillage scientifique, une transcription du texte original, mais aussi une traduction : il s'agit donc ici, pour présenter un livre s'attachant à rendre intelligible également le vénérable manuscrit lui-même, d'une présentation de la façon dont le manuscrit fut conservé, (re)découvert et préservé après avoir subi de graves dommages (in : CRÉPIN, André. Beowulf. Édition diplomatique et critique, traduction française, commentaires et vocabulaire. Göppingen : Kümmerle Verlag, 1991. 2 volumes. Volume 1 : 498 p., volume 2 : de la p. 499 à la p. 1051 (553 p.). Vol. 1, p. 7-10:

    « LA BIBLIOTHEQUE COTTONIENNE

    « Notre unique manuscrit du poème de Beowulf se trouve à la British Library (disjointe du British Muséum en juillet 1973), sous la cote Cotton Vitellius A.xv.

    « Robert Bruce COTTON (1571-1631) tenait son goût pour les Antiquités nationales de sa mère qui prétendait remonter par les Bruce aux rois d'Ecosse, et de William Camden qui, à sa mort en 1623, lui légua ses documents, après avoir été son confrère à la Society of Antiquaries fondée en 1570. Cotton hérita aussi de documents d'Arthur Agard(e), mort en 1614, conservateur des papiers d'Etat. Cotton ouvrait sa maison de Westminster, jouxtant le Parlement et donnant sur la Tamise, à ses collègues parlementaires ou érudits et leur prêtait ses manuscrits. Le manque d'archives nationales.regroupées, publiques, se faisait sentir dans un pays dont la législation s'appuie sur l'autorité de précédents. Cotton joua un rôle d'archiviste officieux. Ce rôle offrait des tentations : de ne pas distinguer ce qui appartenait à soi de ce qui était bien public.de jouer avec les textes. Pour sauver son protecteur Somerset, Cotton n'hésita pas à falsifier des lettres : il fut mis en prison. James I pardonna, pour l'amour de l'Écosse et de l'érudition, à celui qu'il avait fait chevalier puis baronet. Sir Robert Bruce ne partageait pas les idées du monarque sur le pouvoir divin, absolu des rois. Il défendit les droits du Parlement. Quand Charles I remonta la Tamise de Whitehall à Westminster pour se faire couronner, il devait s'arrêter à l'embarcadère de Sir Robert pour y prendre l'évangéliaire du roi Athelstan (r. 924-939) sur lequel les nouveaux souverains étaient censés prêter serment. Cotton attendit en vain : la barge royale ne s'arrêta pas. Quelques années plus tard, prenant prétexte d'un pamphlet trouvé dans la bibliothèque de Cotton, qu'un jeune protégé de l'érudit – peut-être un fils naturel – avait recopié et répandu pour se faire de l'argent, Charles I fit interdire la bibliothèque et arrêter Cotton et son bibliothécaire Richard James. Il les amnistia à la naissance de son fils le futur Charles II (1630) mais la bibliothèque resta sous scellés. Cotton supplia le roi de lui rendre sa bibliothèque, « dont les livres s'abîmaient faute d'aération ».

    « Avant la réponse du roi Cotton mourut de chagrin. — Emouvante histoire d'un homme dont les deux passions, les livres et la politique, se nourrirent mutuellement et finirent par causer le martyre. « L'œuvre écrite de Robert Cotton est historique et politique, mais son œuvre toujours vivante, c'est le trésor de ses manuscrits amassés par héritages, dons, échanges, achats, détournements. La dissolution des monastères en Angleterre par Henry VIII en 1535-9 en avait dispersé les bibliothèques. — Parmi les vedettes,selon nos critères d'aujourd'hui, des quelque 800 volumes de Cotton, outre le volume contenant Beowulf (Vitellius A.xv), figurent les somptueux Évangiles de Lindisfarne (Nero D.iv), 1'évangéliaire d'Athelstan (Tiberius A.ii), l'unique version du poème héroïque vieux-haut-allemand Heliand (Caligula A.vii), les deux seuls manuscrits du Brut de Lawamon (Caligula A.ix et Otho C.xiii), l'unique manuscrit de Sir Gawain and the Green Knight (Nero A.x). « Les livres de la bibliothèque de Robert Cotton étaient rangés dans quatorze armoires, chacune surmontée d'un buste, à la fois ornement et repère. Les bustes étaient ceux des douze Césars, alignés chronologiquement comme chez Suétone (Jules César, plus les huit empereurs de la dynastie julio-claudienne : Auguste, Tibère, Caligula, Claude, Néron, Galba, Othon, Vitellius, plus les trois flaviens : Vespasien, Titus et Domitien. Dans ma jeunesse, les lycéens mémorisaient leurs noms en répétant « Césautica Claunégalo Vivestido ») et les bustes de Cléopâtre et de Faustine, épouse de Marc-Aurèle.

    « Le volume contenant Beowulf se trouvait donc dans l'armoire de Vitellius, sur la première des 6 étagères, la plus élevée, notée A, à la XVe place en partant de la gauche. Smith dans son catalogue (1696 : 79-84) recense 18 volumes sur cette rangée, et le XVe se trouve entre un recueil de textes latins sur le roi de France Charles VIII et un volume de documents concernant l'histoire d'Angleterre du XIIIe au XVe siècles. Cotton disposait donc ses volumes manuscrits d'après leur format, peut-être leur date d'acquisition ou de reliure, pas du tout d'après leur contenu. « Il est piquant de voir Vitellius donner son nom à la cotte du poème de Beowulf. Vitellius est le 3e des 4 empereurs qui se détrônèrent l'un l'autre en 68-69 de notre ère. Si les anciennes fonctions de Vitellius, de gouverneur de la Germanie Inférieure, le rapprochent un peu de notre héros germanique, ses excès de table et sa fin dérisoire de couard le situent à son opposé.

    « Artistes et savants n'ont cessé de puiser dans les richesses de Cotton : poètes comme John Donne (qui mourut moins de deux mois après Cotton), érudits anglais, John Selden notamment, et continentaux, tels J. A. De Thou, A. Du Chesne, N. F. De Peiresc — dont Smith (1696 p. XLVII-L) cite les témoignages de reconnaissance. Les études bibliques et celles du vieil-anglais doivent beaucoup aux matériaux amassés par Cotton.

    « Les descendants de Cotton préservèrent ce caractère de « fondation ». Son petit-fils John (1621-1702) légua la bibliothèque à la nation. La Chambre des Communes forma une commission, présidée par son speaker, Robert Harley, lui-même grand collectionneur. Parmi les membres de la commission figura Humphrey Wanley, bibliothécaire de Harley. La maison de Westminster menaçant ruine, la bibliothèque fut transférée dans le Strand puis à Ashburnham House, avec la bibliothèque du roi (1730). Le nom d'Ashburnham pouvait sembler prophétique : « maison brûlée en cendres » (en réalité le celtique ash et l'anglais burn sont synonymes, « cours d'eau »), Ashburnham House brûla le 23 octobre 1731 — un siècle après la mort de Sir Robert Bruce Cotton. L'incendie détruisit une partie de la bibliothèque : des 958 volumes, 114 furent gravement endommagés, voire réduits à néant ; 98 partiellement brûlés — parmi eux le volume de Beowulf. En 1753 fut fondé le British Museum. La bibliothèque de Cotton, celle de Harley qui en forment le noyau, furent transportées dans les bâtiments du musée.

    « Le manuscrits aux marges rongées par les flammes continuaient, à chaque consultation, à s'effriter. À partir de 1839 Frederick Madden (1801-1873) fit consolider les manuscrits fragiles. Le responsable de la reliure et de l'encadrement des feuillets du Vitellius A.xv, nommé Gough, réalisa son travail méticuleux et solide en 1845. Chaque feuillet fut inséré dans un cadre de papier fort, taillé à sa mesure et prolongé par une plage de papier transparent. Le cadre interdit tout effritement et il évite que le lecteur ait à manier le parchemin. Malheureusement son opacité recouvre certaines lettres au bord des marges et les traces éventuelles de la reliure primitive des cahiers ont disparu. »

    (Copyright © 1991, Kümmerle Verlag).

    N. B. : nous ne reproduisons pas supra, dans l'extrait cité, ni les appels de notes ni les notes elles-mêmes se rapportant au texte original.

    Manuscrit du Beowulf Cotton Vitellius A XV. Recto du folio 1.

    L'illustration de ce paragraphe consiste en une copie du recto de la p. 3 de l'ouvrage.
    Il s'agit d'une reproduction par autotypie (photographie) du recto du premier folio
    du manuscrit Cotton Vitellius A XV du British Museum,
    c'est à dire du manuscrit original du Beowulf.
    [Source : archive.org]

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    LE KALEVALA - ÉPOPÉE NATIONALE DE LA FINLANDE ET DES PEUPLES FINNOIS — (+++++) —

    Réalisation du Sampo magique à la forge.

    Les deux langues officielles de la Finlande sont le suédois et le finnois ; le suédois est une langue indo-européenne, le finnois est (maintenant considéré comme) une langue ouralienne.

    Entre la première moitié du XIXe siècle et le milieu du XXe siècle les tenants d'une certaine théorie scientifique considéraient que les langues finno-ougriennes relevaient d'un complexe linguistique ouralo-altaïque.

    Mais, actuellement, tant les théories scientifiques perdurent manifestement moins longtemps que les philosophies ou les religions (le lecteur ayant atteint un certain âge et se souvenant de cours anciens pourra évoquer, par exemple, la théorie, la doctrine du géosynclinal et quelques autres hypothèses relevant autrefois du dogme scientifique qu'il convenait pour sa tranquillité de ne point discuter…) cette hypothèse ouralo-altaïque est aujourd'hui très généralement récusée (remarquons, incidemment, qu'il ne se trouve en Europe, outre le foyer des langues finno-ougriennes et ouraliennes qu'un seule autre foyer de langues non indo-européennes : le foyer basque — le basque étant considéré comme une langue pré-indo-européenne…).


    — une 1ère partie consacrée au héros mythique Väinämöinen (runot I à X),

    — une 2ème, au beau et prétentieux Lemminkäinen (runot XI à XV),

    — une 3ème, à Väinämöinen (2) encore (runot XVI à XXV),

    — une 4ème, à Leminkäinen (2) encore (runot XXVI à XXX),

    — une 5ème, particulièrement dramatique, au farouche et féroce Kullervo (runot XXXI à XXXVI),

    — une 6ème, au forgeron Ilmarinen (runot XXXVII à XXXIX),

    — une 7ème, à Väinämöinen (3) à nouveau (runot XL à XLIX),

    — une 8ème, à Marjata (runo L ; « christianisation » de l'épopée) où Väinämöinen vaincu quitte à jamais la contrée de ses exploits.


    Voici le résumé du Kalevala tel que nous le livre L. Leouzon-Le-Duc dans l'Introduction — III - p. XIX – XXIX — de l'ouvrage dont nous vous offrons la possiblilité de faire la lecture par l'intermédiaire de notre site :

    « J'esquisserai, maintenant, à grands traits le sujet du Kalevala. Le poème s'ouvre par un chant cosmogonique : la Vierge de l'air descend des hauteurs éthérées au milieu de la mer ; la tempête la berce sur les flots, le souffle du vent féconde son sein ; durant sept siècles, elle porte son lourd fardeau, exhalant ses plaintes et ses gémissements, et invoquant le secours d'Ukko, le dieu suprême. Un aigle qui plane dans les nues aperçoit à la surface de l'eau le genou découvert de la Vierge de l'air ;il le prend pour un tertre de gazon et y bâtit son nid, dans lequel il dépose sept œufs et se met à les couver. La Vierge de l'air secoue tout à coup son genou ; les œufs roulent dans l'abîme, se brisent, et de leurs débris se forment la terre, le ciel, le soleil, les étoiles et les nuages. La Vierge de l'air poursuit ses créations et donne naissance à Wäinämöinen, le runoia éternel.

    « Wäinämöinen complète l'œuvre de la fille de l'air en défrichant la terre et en l'ensemençant. Sa renommée comme runoia se répand au loin. Joukahainen, le fils de Laponie, en est jaloux et vient le provoquer. Wäinämöinen l'accable sous ses formules magiques et le force à demander grâce : mais il ne consent à le délivrer que lorsqu'il lui a promis sa sœur Aino pour épouse. Aino, saisie d'horreur pour une pareille union, se précipite dans la mer. C'est en vain que Wäinämöinen court à sa recherche ; elle a disparu à jamais. Le héros fait appel à sa mère, qui surgit de sa tombe et conseille à son fils d'aller choisir une autre fiancée parmi les vierges de Pohja.

    « Wäinämöinen se met en route ; mais Joukahainen, qui nourrit depuis longtemps contre lui des projets de vengeance, l'épie au passage et lui lance un trait mortel. Le cheval du runoia est seul atteint ; il l'entraîne au sein de la mer, où il devient le jouet d'une violente tempête. Un aigle vient à son secours et l'emporte sur ses ailes jusqu'au but de son voyage.

    « Arrivé aux régions de Pohja, Wäinämöinen est reçu par Louhi, qui lui prodigue une hospitalité généreuse. Elle lui promet la main de sa fille s'il peut lui forger un Sampo (talisman qui porte avec lui la prospérité et le bonheur). Wäinämöinen se récuse et s'engage, si Louhi lui fournit les moyens de retourner dans son pays, à lui envoyer l'habile forgeron Ilmarinen. Louhi se rend à sa demande.

    « Chemin faisant, Wäinämöinen aperçoit la vierge de Pohja au milieu des airs, appuyée sur l'arc-en-ciel. Il l'invite à descendre dans son traîneau et lui demande sa main. La jeune vierge promet de satisfaire à son désir s'il sort vainqueur de trois épreuves qu'elle lui propose. Wäinämöinen réussit dans les deux premières, mais quand vient la troisième, là où il s'agit de la construction d'un bateau, il se blesse grièvement au genou avec sa hache, et son sang coule avec abondance. Un vieillard, savant dans l'art des conjurations, après s'être fait raconter l'origine du fer cause de la blessure, prononce sur elle les formules magiques et guérit le héros. Wäinämöinen reprend alors le chemin de son pays, d'où, conformément à sa promesse, il envoie à Pohja, sur les ailes du vent, le forgeron Ilmarinen. Celui-ci forge le Sampo désiré et réclame celle que Louhi lui destinait pour pris de son travail ; mais la jeune vierge refuse de suivre le forgeron, qui revient seul auprès de Wäinämöinen.

    « Ici, un troisième héros entre en scène, le joyeux et chevaleresque Lemminkäinen. Il séduit toutes les jeunes filles de Saari. Une seule, la plus belle, lui résiste ; il l'enlève, l'emmène dans sa famille et l'épouse. Mais, bientôt, elle lui est infidèle. Lemminkäinen l'abandonne et se rend, à son tour, au pays de Pohja, pour y chercher une autre épouse. Il traverse une foule de fantastiques aventures, au bout desquelles il trouve la mort ; sa mère le rappelle à la vie.

    « Cependant, au moyen des trois paroles originelles obtenues par une suite d'exploits et d'opérations magiques du caractère le plus étrange et le plus émouvant, Wäinämöinen, ayant réussi à construire le bateau que lui avait imposé la vierge de Pohja, se dirige de nouveau vers le pays qu'elle habite. Ilmarinen ne tarde pas à le rejoindre, et, comme il est le plus jeune et qu'il a forgé le Sampo, la jeune fille lui donne la préférence sur le vieux runoia. On célèbre les noces avec une solennité extraordinaire ; les curieux détails qui s'y rattachent ne remplissent pas moins de six longues runot. Tout le monde y est invité, excepté Lemminkäinen, à cause de son esprit turbulent et batailleur.

    « Furieux de cette exclusion, le jeune héros revêt son armure de guerre et part pour Pohja. Là, après avoir triomphé des obstacles et des embûches accumulés sur sa route, il tue le grand chef de famille et cloue sa tête à un poteau. Le peuple de Pohjola s'arme pour la vengeance ; Lemminkäinen prend la fuite et retourne auprès de sa mère, à laquelle il raconte ses sanglants exploits. Celle-ci l'engage à se retirer dans une île lointaine dont elle lui donne le nom, pour se soustraire à la fureur de ses ennemis. Lemminkäinen suit le conseil de sa mère ; mais bientôt, ayant séduit toutes les femmes, toutes les jeunes filles de l'île, il voit les hommes s'ameuter contre lui et est contraint de fuir. Revenu dans son pays, il trouve sa maison brûlée, ses champs dévastés, sa mère disparue ; le peuple de Pohjola s'était vengé. Lemminkäinen s'adjoint un compagnon d'armes et entreprend une nouvelle campagne contre ce peuple ; mais Louhi, la mère de famille de Pohjola, lui oppose une force magique tellement puissante, qu'il doit renoncer à son projet.

    « Vient, maintenant, le magnifique épisode de Kullervo. C'est le génie du mal incarné dans un seul homme. Victime de la fatalité qui le poursuit partout, Kullervo se souille de tous les crimes, viole sa propre sœur et se tue. Je ne crois pas que l'on puisse rien rencontrer de plus riche et de plus saisissant, comme élément tragique, dans aucune autre littérature. Le seul trait qui relie cet épisode à l'ensemble du poëme, est que la femme d'Ilmarinen meurt dévorée par les loups et les ours de Kullervo.

    « Ilmarinen pleure amèrement la perte de sa femme ; il s'en forge une autre en or et en argent, et l'achève à coups de marteau. Mais, quand il l'a portée dans son lit et qu'il s'est couché à côté d'elle, il ne peut supporter le froid que lui cause son contact. Renonçant alors à en faire sa femme, il vient l'offrir à Wäinämöinen ; le runoia la refuse dédaigneusement et exhorte tous ceux de sa race « à ne jamais rechercher pour épouse une fille d'or, à ne jamais courir après une fiancée d'argent ».

    « Ilmarinen, déçu dans sa tentative, retourne à Pohjola, pour demander en mariage la seconde fille de Louhi. Louhi ayant repoussé sa demande avec colère, il enlève la jeune fille et l'emporte dans son traîneau ; mais, durant la route, et tandis qu'il est plongé dans un lourd sommeil, celle-ci se livre à un autre homme. Ilmarinen, furieux, déroulant les paroles magiques, change l'infidèle en mouette, et l'envoie à la cime d'un écueil solitaire, pour y hurler au milieu des tempêtes. Puis il rejoint Wäinämöinen, auquel il raconte ses aventures et vante la prospérité singulière que le Sampo répand sur le pays de Pohja.

    « Dès le début du poème, on a vu poindre entre Kalevala, patrie de Wäinämöinen, d'Ilmarinen et de Lemminkäinen, et Pohja ou Pohjola, patrie de Louhi, une hostilité sourde. Cette hostilité s'est trahie également en plusieurs occasions, dans le cours des runot, bien qu'amortie par les projets de mariage que poursuivaient les héros avec les filles de la région maudite. Maintenant, et par l'effet du dernier refus de Louhi, tout accord est désormais brisé ; rien n'empêchera plus l'hostilité dont il s'agit d'éclater dans toute sa fureur sauvage.

    « Le Sampo sera la pomme de discorde qui armera les deux partis l'un contre l'autre. Jaloux des avantages que Pohjola retire de l'instrument magique, Wäinämöinen forme le projet de le lui enlever et de le transporter dans son pays. Ilmarinen, puis Lemminkäinen, se joignent à lui ; et ils partent ensemble sur un grand navire chargé de guerriers.

    « Tandis que les héros voguent en pleine mer, le navire se heurte tout à coup à un gigantesque brochet qui arrête sa course. Wäinämöinen tue le brochet, et de ses os forme une harpe mélodieuse, un kantele. Chacun essaye d'en jouer, mais nul n'y réussit. Alors, le vieux runoia s'assied sur la pierre de la joie et fait vibrer les cordes de l'instrument. Le kantele résonne dans toute sa force harmonieuse. Les dieux, les déesses, tous les êtres de la nature accourent pour prêter l'oreille à ses accords ; ils sont transportés jusqu'au fond de l'âme et tombent en extase. Wäinämöinen lui-même est touché jusqu'aux larmes, et ses larmes, roulant au fond de la mer, s'y changent en perles fines et resplendissantes. Cette runo est d'un charme et d'une élévation de poésie que rien n'égale.

    « Cependant, l'expédition atteint les rivages de Pohjola. Wäinämöinen propose à Louhi de partager le Sampo avec lui. Louhi refuse et se prépare à la résistance ; tout le peuple répond à son appel et prend les armes. Mais, au moment où il se rassemble pour l'attaquer, Wäinämöinen saisit son kantele et en tire des accords d'une telle puissance qu'il plonge ses ennemis dans un sommeil magique. A la faveur de ce sommeil, les trois héros enlèvent le Sampo, le portent dans leur navire et font voile vers la haute mer. Le silence le plus profond règne à bord. Lemminkäinen, que ce silence importune, entonne, malgré l'opposition de Wäinämöinen, un chant de triomphe. Sa voix rauque retentit au loin et va réveiller le peuple de Pohjola. Louhi s'aperçoit de l'enlèvement du Sampo ; elle évoque contre les ravisseurs une effroyable tempête ; ils échappent avec peine au naufrage, mais le kantele, emporté par les vagues, est précipité au fond de l'abîme.

    « Impatiente de reconquérir le Sampo, Louhi se précipite sur les traces de Wäinämöinen, Le runoia la prévient, et, par la puissance de ses incantations, fait surgir au milieu de sa route un écueil formidable, contre lequel le navire de Pohjola se heurte et se brise. Louhi se change alors en aigle et, prenant ses guerriers sous ses ailes, elle s'élance à travers les airs. Bientôt, elle atteint le navire de Wäinämöinen et se pose à la cime du mât. Lemminkäinen la frappe de son glaive, mais sans la blesser mortellement ; Wäinämöinen l'abat d'un coup de son gouvernail. Tombée sur le pont, Louhi s'efforce d'en arracher le Sampo ; l'instrument vole en éclats, et de ses débris les uns roulent au fond de la mer, les autres flottent à sa surface. Vaincue, Louhi renonce au combat et retourne tristement à Pohjola. De son côté, Wäinämöinen gagne les rivages de son pays, où il retrouve les débris flottants du Sampo ; il les recueille avec soin, et, rendant grâces à Jumala, il invoque sa protection sur son peuple.

    « Les effets du Sampo ne tardent point à se produire. Une prospérité merveilleuse règne dans les régions de Kalevala. A cette nouvelle, Louhi, saisie d'une jalousie sauvage, déchaîne contre ce peuple fortuné une succession d'atroces maladies ; puis un ours monstrueux ; enfin, dans l'excès de sa rage, elle détache le soleil et la lune de la voûte céleste et les enferme au sein d'un rocher inconnu. Mais tous ces efforts demeurent impuissants ; Wäinämöinen les déjoue victorieusement, et le triomphe de Kalevala sur Pohjola est à jamais assuré. Le poëme se termine par une runo où le christianisme à son aurore entre en lutte avec le paganisme et met fin à son règne. C'est l'histoire de Marjatta donnant naissance à son fils. L'enfant divin est nommé roi de Karélie ; il confond la sagesse de Wäinämöinen ; et le vieux runoia, sentant sa mission finie, se construit un bateau et s'élance, seul, sur la mer, où il disparaît à jamais dans les horizons lointains ; mais il laisse le kantele à la Finlande, pour la joie éternelle de son peuple. »

    Kullervo s'en va en guerre.

    Les illustrations de ce paragraphe :
    — La première illustration (reproduction en noir et blanc) se trouve, légendée
    « THE FORGING OF THE MAGIC SAMPO - From the painting by A. Gallen »
    (La forge du Sampo magique - D'après le tableau d'A. Gallen [huile sur toile, 1893 ; Akseli Gallen-Kallela]),
    in : MECHELIN, Leopold Henrik Stanislaus. Finland in the Nineteenth Century by Finnish authors -
    Illustrated by Finnish artists. Helsingfors : F. Tilgmann, 1894. 476 p. P. 373.
    [Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:MECHELIN(1894)_p373_The_Forging_of_the_Magig_SAMPO.jpg]
    — La seconde illustration se trouve légendée : « Kullervo zieht in den Krieg »
    (Kullervo s'en allant guerre) ; et figure une fresque (de 1901)
    réalisée par Akseli Gallen-Kallela (1865-1931), reproduite (en noir et blanc également)
    in : OKKONEN, Onni. Die finnische Kunst. Berlin : Wilhelm Limpert Verlag, 1943.
    254 p. (45 p., et 209 p. avec illustrations en pleines pages).
    [Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:A._Gallen-Kallela_Kullervo.jpg]

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    DICTIONNAIRE – MYTHES (grecs, romains, étrusques, phéniciens, germaniques…) — (+++++) —

    Lexique constituant « une espèce de Commentaire général de Mythologie ». Un petit dictionnaire très dense, dans son édition de poche de 1810.

    La première et la deuxième pages de couverture de notre fichier PDF n'appartiennent pas à l'ouvrage d'origine mais sont de composition récente (la couverture de notre exemplaire de cet ouvrage est muette et comporte seulement un dos renseigné et décoré).

    Chompré. Dictionnaire abrégé de la Fable. Lettre A : première page. Vue à 25%.

    L'illustration de ce paragraphe consiste en une vue,
    réduite à 25 %, de la page 1 de l'ouvrage considéré.

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